Comment va Maëlle ? En ce vendredi du début du mois de novembre, elle va bien. Même si elle rouspète au moment où l'aiguille du cathéter s'enfonce près de l'épaule droite, elle vient de passer une bonne semaine depuis ses derniers traitements. Et la semaine prochaine ? On verra.

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Ainsi coulent les jours et les semaines de Catherine Kozminski ; un combat à la fois.

À la loterie des maladies chroniques, sa belle Maëlle de 9 ans a gagné le gros lot. Diagnostiquée autiste à l'âge de 2 ans, Maëlle a défié tous les pronostics sur son développement grâce à la stimulation précoce prodiguée par ses parents. Oui, elle accuse un retard à l'école. Mais il ne lui sera pas impossible d'apprendre un métier et de gagner sa vie.

Mais quand elle s'est mise à souffrir d'étranges symptômes qui la laissaient épuisée, à la fin de la journée, au point d'être physiquement incapable d'avaler un verre d'eau, même les médecins étaient perplexes. C'est Catherine qui, à force de fouiller l'internet et de harceler tous les spécialistes pédiatriques, a mis un nom sur la maladie : myasthénie grave. Et ce n'était pas une bonne nouvelle.

La myasthénie grave est une maladie neuromusculaire auto-immune en vertu de laquelle les anticorps empêchent la transmission de l'influx nerveux du nerf au muscle. Le muscle touché est frappé d'une paralysie temporaire, surtout en fin de journée, qui disparaît après un repos. La vulnérabilité est surtout respiratoire ; incapables de tousser pour dégager la trachée, les victimes risquent l'étouffement, la détresse respiratoire. La maladie s'attaque habituellement aux adultes et peut être généralement assez bien traitée - essentiellement en limitant la reproduction d'anticorps.

Mais pour Maëlle, ça ne marche pas, ses anticorps se reproduisent trop vite. « En deux ans, on a épuisé toutes les ressources que la médecine traditionnelle pouvait nous offrir, dit sa mère. On en est aux traitements expérimentaux. Et Maëlle commence à être résistante. » Catherine Kozminski le dit franchement, sans apitoiement. Elle garde ses énergies pour lire tout ce qui s'écrit sur le sujet, pour éplucher les études scientifiques, pour échanger de l'information avec d'autres malades, à la recherche d'une nouvelle piste, d'un nouvel espoir.

Un rêve pour Maëlle ? Ce matin, Maëlle rêve qu'on lui fiche la paix avec les questions philosophiques. Il y a des jours comme ça où elle se rebelle contre la plasmaphérèse hebdomadaire à l'hôpital, la chimiothérapie liquide, les pilules aux trois heures. Pas une mauvaise chose en soi, note Catherine. « Si elle acceptait tout sans rien dire, ce serait un signe qu'elle perd goût à la vie. » Quand Maëlle est furieuse, elle est aussi furieusement vivante.

Catherine Kozminski, par contre, sait très bien ce qu'elle veut. Sur le grand carton blanc, elle aurait pu écrire « Je rêve que Maëlle fête ses 20 ans ». Mais elle a choisi une formule directe, plus cartésienne, qui nomme cette maladie qui s'attaque à sa fille. « Un mystère qui a un nom », dit-elle, et qui touche par ricochet les parents, les grands-parents, le frère et la soeur de Maëlle. Guérir la myasthénie grave, c'est aussi un rêve de famille.

Mais Maëlle, qu'écrirait-elle sur son grand carton ? Souhaite-t-elle ne plus être malade ? Mouais, dit-elle sans vraiment s'emballer. « Elle adore les animaux », dit Catherine. Maëlle, qui a gardé les yeux sur la télé pendant tout le traitement, s'anime tout à coup en parlant de sa grenouille albinos, de son chien labernois Mira, de ses poissons et de ses escargots, de son lézard Gecko pour qui elle chasse les grillons.

Les traitements sont finis pour aujourd'hui, tout le monde s'apprête à quitter la chambre. Et soudain, Maëlle s'illumine, oubliant la douleur et les journalistes enquiquinants. Elle a enfin trouvé son rêve juste pour elle, et elle l'affirme bien fort pour que tout le monde le sache.

« Je veux avoir un chien saucisse ! »

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