Le gouvernement a déployé des milliers de policiers à La Malbaie, érigé une clôture de deux kilomètres et construit un centre de détention en prévision d'éventuels débordements. Mais hier, dans la petite ville au bord du fleuve, une quinzaine de manifestants seulement ont osé se montrer le bout du nez.

La « zone de libre expression », ce stationnement ceinturé de 70 clôtures, legs de la Formule E, transportées expressément de Montréal, était vide vers 15 h. Vide, à part un manifestant qui brandissait sa pancarte.

« La zone n'est pas invitante, elle est traumatisante. Tu viens ici, on dirait que tu étouffes », a déploré Guillaume Lespérance, un enseignant de 30 ans qui habite La Malbaie.

M. Lespérance est venu à vélo, a traversé le barrage de police pour se rendre à la zone et il a eu la mauvaise surprise de la trouver pratiquement vide.

« On est loin de 2012... Je me doutais qu'on ne serait pas beaucoup, mais je ne pensais pas être seul. »

- Le manifestant Guillaume Lespérance, venu dénoncer une dépense de fonds publics « scandaleuse »

Le gouvernement de Justin Trudeau a dépensé 600 millions pour la tenue du G7 dans Charlevoix.

Au fil de la journée, une quinzaine de manifestants au total a investi la zone. Il y a eu ce couple de retraités des Éboulements, un petit groupe de Coréens venus déplorer le rapprochement entre les États-Unis et la Corée du Nord et quelques Lévisiens d'origine ukrainienne qui voulaient dénoncer la Russie.

UNE VILLE DEVENUE FORTERESSE

Une caméra est accrochée à une clôture pour filmer la « zone de libre expression ». Les manifestants sont invités à se planter devant pour énoncer leurs revendications. Une pancarte explique que les images sont retransmises à l'intérieur du Manoir Richelieu, où les chefs d'État peuvent les regarder, ou simplement les ignorer.

« Je trouvais ça important de sortir parce que s'il n'y avait personne ici, peut-être qu'ils se diraient dans le Manoir que tout ce qu'ils font, c'est beau », a noté M. Lespérance, qui portait une pancarte sur laquelle on pouvait lire : « Skype = 0 $, G7 = 605 millions ».

En conférence de presse, le maire de La Malbaie s'est réjoui de la tournure des événements. « Le niveau de risque est très, très bas », a dit Michel Couturier, dont la ville a été transformée en forteresse.

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De 8000 à 9000 

Nombre de policiers qui sont déployés entre La Malbaie et Québec pour le G7

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La Presse a voulu connaître le nombre de policiers postés spécifiquement dans Charlevoix, mais une porte-parole de la Gendarmerie royale du Canada a dit ne pas avoir le chiffre.

Le Manoir Richelieu est protégé par une clôture de 1,4 kilomètre, sans compter la clôture de la « zone de libre expression ». À La Malbaie, les policiers sont partout, et on a même installé des points de contrôle dans des villages environnants.

Le nombre famélique de manifestants à La Malbaie ne surprend pas la militante Angela Giles, du Conseil des Canadiens. Selon elle, la répression et les arrestations de masse au G20 de Toronto en 2010 ont créé un climat « d'intimidation » au pays.

« Ici, ils ont utilisé des millions et des millions en sécurité et jeudi à La Malbaie, on était quatre dans la zone de libre expression, dit-elle. C'est absolument exagéré. »

PHOTO ROBERT SKINNER, LA PRESSE

Au fil de la journée, une quinzaine de manifestants au total a investi la « zone de libre expression », dont un groupe de Coréens venus déplorer le rapprochement entre les États-Unis et la Corée du Nord.