La menace du président américain, Donald Trump, d'avoir recours à la clause de l'Accord de libre-échange nord-américain (ALENA) permettant l'annulation du traité a soulevé des questions sur ce que le Canada pourrait faire par rapport à cette stratégie de négociation plutôt musclée.

Selon plusieurs sources, la réponse est simple: rien.

Ottawa devrait demeurer à la table des négociations et c'est sans doute ce qu'il fera pour des raisons stratégiques, estiment ces spécialistes. Plusieurs hauts dirigeants du gouvernement fédéral sont aussi de cet avis, estimant que le pays protégera mieux ses intérêts en restant calme plutôt qu'en tapant du pied.

La pression se fait de plus en plus forte. M. Trump a commencé à dire qu'il voulait se prévaloir de l'article 2205 de l'ALENA, qui autorise un pays à se retirer du traité avec un préavis de six mois, parce qu'il croyait que cela effrayerait le Canada et le Mexique, et les pousserait à faire des compromis.

Le gouvernement mexicain a dit qu'il refuserait de négocier dans un tel contexte. Mais certains experts canadiens privilégient une approche complètement différente, soutenant que la patience produira probablement les résultats escomptés.

C'est le cas de celui qui a agi comme négociateur en chef du Canada lors des pourparlers pour l'ALENA en 1993, John Weekes.

«Aussi tentant que cela puisse l'être de dire "Eh bien, allez vous faire voir, nous quittons la table des négociations", je pense que ce serait préférable de continuer à négocier», a affirmé M. Weekes lors d'une entrevue réalisée durant une foire commerciale organisée par le Cato Institute, à Washington. Nous allons seulement dire «Écoutez, cette menace ne nous fera pas changer d'avis. Et si vous décidez après six mois ou quelque temps après de vous retirer, c'est à vos intérêts que vous allez nuire».»

La résistance est déjà en train de s'organiser à Washington.

Des membres du propre parti du président Trump ont commencé à exprimer de l'inquiétude. Certains membres de son cabinet ont souligné qu'un retrait de l'ALENA serait particulièrement douloureux pour les États profondément républicains ayant voté pour le milliardaire lors de la dernière élection et pour qui le Mexique représente un marché majeur pour leurs exportations de produits agricoles.

Le plus puissant lobby du monde des affaires américain, la U.S. Chamber of Commerce, qui bénéficie du soutien du parti républicain, tiendra d'ailleurs la semaine prochaine un événement pour l'ALENA auquel participeront les sénateurs du Kansas et du Texas, Pat Roberts et Ted Cruz.

Si Donald Trump met sa menace à exécution, de nombreux observateurs prédisent aussi une longue et complexe bataille devant les tribunaux en raison d'une contradiction entre l'Article 1 de la Constitution américaine, qui donne le pouvoir au Congrès de gérer le commerce international, et l'Article 2, qui place les traités internationaux sous la férule du président.