Incapable de faire quoi que ce soit avec les données «lourdement chiffrées» fournies par Apple, la famille de Jesse Galganov, ce Montréalais disparu au Pérou il y a un mois, se tourne vers le FBI pour les faire décrypter.

La famille de M. Galganov, un citoyen canado-américain, implorait depuis une semaine Apple de lui fournir la position GPS exacte enregistrée par son iPhone avant de disparaître près de Huaraz, au Pérou, le 28 septembre.

À la suite d'une demande des autorités américaines, Apple a accepté de fournir un fichier de 11 Gb contenant l'essentiel du compte iCloud relié au iPhone de M. Galganov, affirme sa mère, Alisa Clamen. Actuellement au Pérou pour le retrouver, elle estime que les fichiers photo et textes enregistrés par l'appareil et accessible sur son compte iCloud «sont la meilleure piste que nous ayons à l'heure actuelle pour trouver Jesse».

«Je ne peux absolument rien faire avec les données qu'Apple a fournies. Un agent du Département d'État a essayé de télécharger le fichier et n'y est même pas parvenu. C'est débile qu'Apple nous laisse en plan comme ça, sans nous aider d'aucune façon», déplore Mme Clamen.

«Le FBI est en train d'essayer de travailler dessus. C'est un protocole sécuritaire complètement fou», ajoute Mme Clamen.

Joint hier, le FBI National Presse Office a refusé de commenter ces informations. Le Département d'État, qui dit prendre part aux efforts de recherches pour trouver M. Galganov, nous a référé au FBI pour cette question. Une source proche de l'enquête nous confirme que le FBI est impliqué dans l'enquête, mais n'a pas dit à quel niveau. 

Apple assure par ailleurs que les techniciens ont fourni dès que possible un maximum d'informations contenues sur le téléphone de M. Galganov, mais qu'il est impossible de donner des informations qui permettront de déchiffrer le compte.

«Apple dit qu'elle n'a pas la capacité de déchiffer les données confidentielles des comptes de ses clients, et c'est probablement vrai», estime le spécialiste en sécurité Éric Lessard. «Au risque d'avoir l'air des méchants, ils doivent tracer une ligne à quelque part. S'ils ne le faisaient pas, il y aurait toujours un avocat qui réussirait à trouver une ligne d'attaque juridique pour forcer l'entreprise à dévoiler des données personnelles, et ça, Apple ne le veut pas. C'est son modèle d'affaires qui est en jeu.» 

Selon lui, la meilleure façon de déterminer la dernière position du téléphone de M. Galganov est plutôt de passer par le fournisseur de téléphonie cellulaire de l'appareil, en l'occurrence T-Mobile. Cette dernière a d'ailleurs dévoilé cette semaine à l'équipe de recherche le nom du fournisseur local péruvien auquel le iPhone était connecté le jour de la disparition. Des démarches judiciaires sont en cour au Pérou pour forcer ce petit fournisseur à dévoiler certaines données. «Le fournisseur connaît parfaitement la couverture géographique de son réseau. La dernière position, avec les données des antennes et un calcul de trigonométrie, c'est vraiment le fournisseur de télécoms qui peut la donner», assure M. Lessard.

En 2016, Apple avait refusé de fournir au FBI le mot de passe du téléphone de Syed Rizwan Farook, le terroriste impliqué dans la tuerie de San Bernardino, qui a fait 14 morts et 22 blessés. Même forcée par une injonction, Apple se disait incapable de déchiffrer les données. Les enquêteurs avaient finalement réussi à débloquer le téléphone en se tournant vers un groupe de pirates, selon ce qu'avaient affirmé plusieurs médias américains.