Le premier ministre Justin Trudeau se dirige vers Washington pour resserrer les liens avec les États-Unis au moment où une majorité de Canadiens ne souhaitent pas voir leur pays suivre l'exemple de leur voisin du sud, révèle une nouvelle enquête.

Les résultats semblent démontrer que la population canadienne est en faveur d'une approche plus ouverte sur le monde, malgré quelques indicateurs isolationnistes légèrement en hausse.

Soixante pour cent des participants à un sondage Ekos-La Presse canadienne mené auprès de 4839 Canadiens ont indiqué ne pas être intéressés par une approche «Canada First» qui imiterait la tactique «America First» du président Donald Trump.

80 % des personnes interrogées ont dit être en désaccord avec la manière dont M. Trump dirige son pays, et 52 % souhaitent voir le Canada se distinguer encore plus des États-Unis.

En revanche, 22 % des participants à l'enquête croient que le Canada devrait s'isoler davantage sur la scène internationale, une hausse importante après des années de stabilité.

37 % des personnes interrogées sont d'avis que les règles canadiennes en matière d'immigration ouvrent les portes du pays à trop de membres des minorités visibles, alors que 42 % croient que le Canada en accueille juste assez et que 15 % estiment qu'on pourrait en recevoir plus.

Selon le président d'Ekos, Frank Graves, le nombre de citoyens trouvant qu'il y a trop d'immigration a atteint un sommet juste avant la dernière élection fédérale et serait en déclin depuis.

29 % des participants ont dit avoir été victimes de racisme au cours des mois précédents et 33 % ont dit croire que le racisme est de plus en plus répandu.

Le sondage par téléphone a été mené entre le 15 septembre et le 1er octobre. Il a une marge d'erreur de plus ou moins 1,4 point de pourcentage, 19 fois sur 20.

L'enquête d'opinion s'inscrit dans une démarche qui vise à découvrir si les mêmes facteurs qui ont alimenté les mouvements populistes et isolationnistes ailleurs dans le monde sont présents au Canada.

Les sondeurs ont utilisé des échantillons différents pour chacune des questions afin de pouvoir poser plus de questions.

Ekos évalue les comportements de la population envers les minorités visibles issues de l'immigration depuis 25 ans afin d'observer le niveau d'intolérance raciale au Canada, explique M. Graves.

Des questions sur la perception qu'ont les gens de leur avenir économique ont aussi été posées. Les résultats suggèrent une vision plutôt pessimiste de l'avenir malgré que les indicateurs économiques penchent vers le contraire.

En recoupant ces données avec celles sur l'ouverture à l'immigration, Frank Graves soutient qu'on ne peut exclure qu'une certaine frustration économique et sociale alimente un certain populisme, comme on le voit ailleurs dans le monde.

«Il y a clairement une importante part de Canadiens qui ne sont pas convaincus par le concept que l'ouverture du Canada est la bonne solution aux problèmes auxquels ils font face dans leur vie et dans le pays», analyse M. Graves.

L'avenir dira quel impact auront ces perceptions sur le paysage politique au Canada. Parmi ceux qui considèrent que le pays accueille trop de minorités visibles, 64 % se présentent comme des partisans conservateurs. De l'autre côté, 62 % de ceux qui croient que le pays en accueille juste assez se disent libéraux.

Cependant, Frank Graves rappelle que des études ont démontré que les gens qui exprimaient de l'intolérance raciale et qui ont appuyé Donald Trump aux États-Unis ont aussi affirmé qu'ils auraient appuyé les démocrates si le parti avait offert une plateforme plus progressiste.

Le soutien envers l'immigration demeure dans le haut de la liste de priorités du gouvernement libéral. Le nombre cible d'immigrants qui seront accueillis en 2018 devrait être dévoilé au cours des prochaines semaines.