Plus de deux mois après les inondations historiques qui ont touché le Québec, des centaines de personnes vivent toujours à l'hôtel ou chez des proches. Plusieurs sinistrés devront patienter encore cinq semaines avant de savoir s'ils pourront reconstruire leur maison ou s'ils devront se résigner à la démolir. Le ministre de la Sécurité publique, Martin Coiteux, a indiqué mardi que son ministère avait embauché du personnel pour accélérer la distribution des rapports d'inspection.

Au printemps, 4200 personnes ont été évacuées. Deux mois plus tard, 360 ménages - dont 140 à Montréal - ne peuvent toujours pas réintégrer leur domicile. Les habitants sinistrés dorment encore à l'hôtel, chez des membres de leur famille ou des amis. «L'Outaouais, Pierrefonds-Roxboro et Rigaud sont les endroits au Québec où il reste le plus de sinistrés. L'hébergement et la nourriture leur seront fournis par la Croix-Rouge aussi longtemps que nécessaire», a assuré Carl Boisvert, porte-parole de la Croix-Rouge canadienne.

Durant deux mois, les sinistrés ont dû se rendre chaque semaine à leur bureau de la Croix-Rouge pour faire renouveler leur demande d'aide. Depuis cette semaine, les suivis hebdomadaires peuvent se faire par téléphone. «Ça évite aux gens d'avoir à se déplacer, c'est un souci de moins pour eux, explique M. Boisvert. On peut se permettre cette façon de procéder maintenant que les besoins changent beaucoup moins rapidement qu'en début d'intervention.»

La majeure partie des sinistrés ayant transmis une demande d'aide à Québec, soit 92%, ont déjà reçu la visite d'inspecteurs. C'est toutefois seulement après la réception du rapport d'inspection que les gens connaîtront l'ampleur des travaux à effectuer... ou sauront s'ils doivent se résigner à démolir. Le décret que le gouvernement s'apprête à adopter prévoit en effet que les résidences doivent être démolies si elles sont endommagées à plus de 50%.

Du personnel en renfort

Pour l'heure, seulement 400 rapports d'inspection ont été remis aux sinistrés. Le ministre Coiteux assure que ce nombre augmentera rapidement; il prévoit la distribution des derniers rapports d'ici cinq semaines.

«Les rapports commencent à rentrer, et ça va s'accélérer. On roule à 500 dossiers par semaine. Je comprends que c'est long, mais je peux vous assurer qu'on fait notre maximum», affirme M. Coiteux.

Le ministère de la Sécurité publique a embauché 90 personnes pour prêter main-forte à son personnel afin de répondre aux nombreuses demandes d'aide. «Normalement, on n'a pas 278 municipalités touchées. On n'a pas 5000 résidences inondées. Ça nous prenait des ressources additionnelles et on les a ajoutées », a-t-il indiqué.

Le Ministère évalue aussi que plus de 2000 personnes ont participé aux consultations organisées lundi soir dans 15 régions du Québec pour entendre les citoyens sur le décret. «On va prendre les jours qui viennent pour analyser le résultat de ces consultations», a dit Martin Coiteux. Tout en se montrant ouvert à des assouplissements, le ministre de la Sécurité publique s'est montré ferme sur l'objectif d'éviter que des gens s'exposent à de nouvelles inondations.

«On ne va pas être plus laxistes que les règles actuelles lorsqu'on sait, notamment à cause des changements climatiques, que des épisodes comme cela risquent de se répéter plus souvent, a-t-il réitéré. Il y a des dangers, et il faut protéger les gens. Faire comme si ce n'était pas des zones inondables et reconstruire tel quel, c'est quelque chose qu'on ne peut pas envisager parce qu'on met en danger la sécurité des personnes.»

Bureaux permanents

Critiqué pour le manque d'informations offertes aux sinistrés, le gouvernement ouvrira des bureaux permanents dans les villes les plus touchées par les inondations, soit Montréal, Gatineau et Rigaud. Le ministre Coiteux dit avoir pris bonne note de l'impatience et du mécontentement exprimés lors des consultations de lundi soir. «Les citoyens sont préoccupés par la question des délais et je les comprends. Ils ont vécu un drame très difficile et ils ont hâte de recevoir un rapport d'inspection.»

Mais pour William Groulx, qui dit attendre depuis six semaines le rapport d'inspection de sa résidence, dont le sous-sol a été complètement détruit par la crue printanière, la rencontre de lundi a été décevante. Il attend l'évaluation avant d'entreprendre les travaux de reconstruction et affirme être sorti bredouille de la rencontre. «Pourquoi faire une rencontre avec quatre personnes en avant qui ne savent rien? On n'est pas plus avancés», dénonce ce sinistré.

«Oui, ils bougent, mais ils auraient dû bouger il y a longtemps, se désole un autre sinistré, René Leblanc. Ce n'est pas la première ni la dernière fois qu'on a une crise au Québec. On vit dans une région où le climat varie de façon sévère. Si on n'a pas de protocole d'urgence, ça me fait peur.»

À Montréal, le Service de sécurité incendie a évalué que 76 maisons avaient été trop endommagées par les inondations pour que l'on puisse permettre à leurs habitants de les réintégrer. Satisfaite du décret présenté par le gouvernement, la Ville de Montréal espère que les citoyens recevront rapidement leur rapport d'inspection afin d'entreprendre les travaux de reconstruction.