Dans la foulée du drame à Mont-Saint-Hilaire, un organisme demande au gouvernement québécois d'adopter un protocole uniforme partout au Québec dans les cas de violence conjugale pour que les victimes soient redirigées immédiatement vers des intervenantes spécialisées.

Daphné Huard-Boudreault, âgée de 18 ans, est morte après avoir été retrouvée grièvement blessée dans sa résidence de Mont-Saint-Hilaire, plus tôt cette semaine. Son ex-ami de coeur, Anthony Pratte-Lops a été formellement accusé de meurtre prémédité, jeudi.

Le Bureau d'enquête indépendante (BEI) examinera le travail des agents de la Régie intermunicipale de police Richelieu/Saint-Laurent. Bien que plusieurs versions de l'histoire se contredisent, selon plusieurs témoins, la jeune femme aurait appelé la police avant que le drame se produise.

Le Regroupement des maisons pour femmes victimes de violence conjugale demande au gouvernement d'agir pour que dès qu'une plainte de violence conjugale survient, les policiers redirigent la personne vers des intervenantes spécialisées en la matière.

La présidente du regroupement, Sylvie Langlais, souligne que les victimes seraient ainsi en contact avec des experts qui côtoient quotidiennement de telles situations.

Mme Langlais rappelle que les policiers «ne peuvent pas comprendre toutes les subtilités» des problèmes de violence conjugale.

«Peut-être que si Daphné avait été en contact avec une intervenante, celle-ci aurait pu faire des recommandations, aurait pu sensibiliser Daphné à la dangerosité à laquelle elle pouvait faire face», a-t-elle expliqué en entrevue téléphonique avec La Presse canadienne.

«L'intervenante, j'en suis convaincue, aurait dit à madame: soyez vigilante, attendez. Si vous allez chercher vos effets personnels, assurez-vous qu'il y ait deux policiers», a-t-elle ajouté.

Mais pour répondre à toutes les demandes, les regroupements auront besoin de plus de fonds. Mme Langlais appelle donc gouvernement à investir davantage dans la prévention.

La présidente déplore d'ailleurs le manque de formation des policiers sur cet enjeu - ils n'ont environ que six heures de formation à l'école de police, selon elle.

«Ce qu'on réclame aussi depuis des années auprès du ministre de la Sécurité publique, c'est qu'il y ait une mise à jour de la formation (...) On demande une formation continue», a-t-elle soutenu.

Comité sur la violence conjugale

Mme Langlais semblait encouragée à l'idée qu'une rencontre avec le ministère serait prévue dans quelques jours en vue de la mise sur pied d'un comité, ce qui était prévu dans le plan d'action contre la violence conjugale 2012-2017. Ce groupe de travail offrirait des recommandations pour notamment mieux outiller les policiers dans de telles situations.

Selon Mme Langlais, des rencontres sur ce futur comité ont eu lieu en 2014, en 2015, puis en 2016, sans qu'il en ressorte quelque chose de substantiel, mais elle espère que ce nouveau drame aura «sonné une sirène d'alarme» auprès des décideurs.

Vendredi, le Parti québécois - qui n'avait pas fait de lien direct avec le drame à Mont-Saint-Hilaire dans son communiqué - avait interpellé le gouvernement «afin que le Plan d'action gouvernemental 2012-2017 en matière de violence conjugale soit enfin mis en oeuvre».

«Les libéraux n'ont rien fait, concrètement, pour faire progresser la lutte contre la violence conjugale», déplorait la députée Mireille Jean.

Interrogé sur le drame à la lumière des propos du Parti québécois, le premier ministre Philippe Couillard a tonné contre le Parti québécois.

«Je trouve ça épouvantable d'utiliser une tragédie, comme ça, à des fins politiques partisanes. Jamais moi, je ferais quelque chose comme ça», a-t-il lancé en marge d'un colloque régional.

«C'est terrible ce qui est arrivé à cette jeune femme. Ce qu'on veut surtout voir, c'est ce qui est arrivé, on va aller au fond des choses, il y a une enquête qui est en cours. Et surtout, M. Coiteux l'a dit et il va le répéter, s'il le faut, et je crois qu'il faudra améliorer la façon dont on fait les choses quand on signale des cas de violence conjugale, on va le faire», a-t-il ajouté.

En 2014 - les dernières données disponibles du ministère de la Sécurité publique - il y avait eu 11 cas d'homicides des suites de violence conjugale. Toutes les victimes étaient des femmes.

Pendant cette même année, le ministère avait recensé 30 tentatives de meurtre.

En général, la violence conjugale touche bien davantage les femmes - plus de 78 pour cent des victimes étaient des femmes en 2014.