Des opposants à l'expansion du pipeline Trans Mountain de Kinder Morgan se sont rassemblés sur la colline du Parlement, lundi, pour tenter de mettre de la pression sur le gouvernement libéral.

Ottawa doit rendre sa décision sur ce projet d'oléoduc avant la fin de l'année. L'Office national de l'énergie (ONÉ) lui a déjà donné son aval, pourvu que Kinder Morgan respecte 157 conditions.

Un à un, les manifestants provenant des quatre coins du pays, généralement des étudiants, ont franchi les clôtures entourant l'édifice du centre et se sont fait arrêter par les policiers. Les actes de désobéissance civile avaient été annoncés à l'avance et les arrestations se sont faites dans le calme, voire la bonne humeur.

La police tendait même parfois la main au manifestant pour l'aider à traverser la barrière.

Au total, la Gendarmerie royale du Canada (GRC) a procédé à 99 arrestations.

«On est ici parce qu'on veut que le premier ministre Justin Trudeau écoute la voix de la jeunesse, écoute la science derrière les changements climatiques et nous dise très clairement qu'on ne peut plus construire d'infrastructure qui va permettre l'expansion des sables bitumineux en Alberta», a signalé Gabriel D'Astous, finissant de l'Université de la Colombie-Britannique (UBC).

Une étudiante de l'Université de Toronto, Amanda Harvey-Sanchez, a pour sa part rappelé qu'en signant l'Accord de Paris, le Canada s'est engagé à limiter la hausse des températures bien en-deçà de 2 degrés Celsius, et si possible, de 1,5 degré Celsius.

«On ne peut pas faire ça tout en facilitant l'expansion des sables bitumineux - et c'est ce que Kinder Morgan ferait. Ainsi, ce pipeline est en conflit direct avec nos engagements internationaux», a-t-elle fait valoir.

La firme Kinder Morgan veut tripler la capacité de son oléoduc Trans Mountain, qui relie l'Alberta au port de Burnaby, près de Vancouver. Le projet de 6,8 milliards $ permettrait de faire passer sa capacité de 300 000 barils par jour à 890 000 barils par jour.

L'une des manifestantes, Ashley Russell, d'Ottawa, s'inquiète particulièrement des risques de bris qui pourraient causer un déversement.

«En dépit de notre dépendance au pétrole, nous devons aller de l'avant en en réduisant notre utilisation. Ce pipeline ne nous amène pas dans cette direction», a-t-elle souligné.

À la sortie de la période de questions aux Communes, le ministre des Ressources naturelles, Jim Carr, n'a pas paru surpris que l'enjeu des pipelines mobilise à ce point la population.

«Nous savons que les gens ont des opinions fortes sur les projets énergétiques majeurs», a souligné le ministre.

«C'est malheureux si des gens sont allés peut-être plus loin qu'ils auraient dû. Mais nous avons dit depuis le départ que non seulement le Parti libéral tolère la dissidence, mais qu'il l'embrasse», a-t-il ajouté.

La députée néo-démocrate Niki Ashton croit pour sa part que ces manifestants sont le symbole de la frustration d'une grande part de Canadiens.

«Il y a plusieurs jeunes qui sont frustrés du gouvernement fédéral, qui leur a promis la réconciliation, qui leur a promis qu'il allait prendre des décisions d'une façon différente, en particulier sur les projets d'extraction. Évidemment, on voit que ce n'est pas le cas», a-t-elle dit.

Le chef intérimaire bloquiste Rhéal Fortin a rappelé la forte opposition des Québécois au projet Énergie Est et il estime que, pour les deux projets d'oléoduc, l'acceptabilité sociale n'est pas au rendez-vous.

«C'est clair quant à moi que les infrastructures qui visent à l'exploitation du pétrole des sables bitumineux, ce sont des infrastructures qui ne sont pas acceptables, au moment où on se parle. Et je n'entrevois pas d'avenir où ça pourrait le devenir», a-t-il soutenu.

Les manifestants qui ont franchi la barrière n'ont pas écopé d'amende mais ils se sont vu interdire l'accès à la colline du Parlement pour les trois prochains mois.