Le ministre chinois des Affaires étrangères a fermement réprimandé, mercredi à Ottawa, une journaliste canadienne qui l'avait interrogé sur le piètre bilan de son pays en matière de respect des droits de la personne.

En visite au Canada, Wang Yi a estimé que la reporter du site web IPolitics avait agi de manière «irresponsable» en lui posant une question sur ce sujet délicat et sur l'emprisonnement du Canadien Kevin Garratt pour espionnage.

Le ministre Wang semblait réellement en colère alors qu'il sermonnait la journaliste, par l'entremise d'un interprète, à l'occasion d'une conférence de presse conjointe avec le ministre des Affaires étrangères, Stéphane Dion, dans le foyer du quartier général d'Affaires mondiales Canada.

«Votre question est empreinte de préjugés et d'arrogance - antichinoise, a-t-il dit, très remonté. J'ignore d'où vous tenez ça. C'est tout à fait inacceptable. Personne ne connaît mieux que les Chinois eux-mêmes la situation des droits de la personne en Chine. Alors, j'aimerais vous suggérer de ne pas, s'il vous plaît, poser de questions de manière aussi irresponsable. Nous accueillons volontiers les suggestions formulées de bonne foi, mais nous rejetons les accusations sans fondements et injustifiées.»

La question de la reporter du site IPolitics avait été posée au nom de journalistes de plusieurs médias, dont La Presse Canadienne.

Le ministre Wang a aussi demandé à la journaliste si elle avait déjà visité son pays. «Savez-vous que la Chine a sorti de la pauvreté plus de 600 millions de personnes ? Et savez-vous que la Chine, partie de très loin, est aujourd'hui la deuxième économie mondiale ? (...) Et savez-vous que la Chine a enchâssé dans sa Constitution la protection et la promotion des droits de la personne?»

Un peu plus tôt, en réponse à la question qui a offusqué son homologue chinois, le ministre Dion a indiqué qu'il avait évoqué le dossier de Kevin Garratt avec M. Wang, et qu'il ne rate jamais une occasion de soulever la question des droits de la personne et d'autres irritants diplomatiques.

«Ces discussions font partie intégrante d'une relation saine, a indiqué M. Dion. Nous savons que nous ne serons pas toujours d'accord sur tout, mais nous devons progresser.»

La Chine et le Canada s'entendent aussi pour diverger d'opinions dans le délicat conflit territorial en mer de Chine méridionale, a admis le ministre Dion. M. Wang a été passionné, mais le ministre Dion lui a rappelé que les voisins de la Chine le sont aussi.

Par ailleurs, la Chine souhaiterait bien conclure un accord de libre-échange avec le Canada, mais les deux ministres n'avaient rien à annoncer de ce côté mercredi. La Chine n'est pas partie du Partenariat transpacifique, signé en février 2016.

Le ministre chinois a diplomatiquement évité de parler du précédent gouvernement conservateur de Stephen Harper, au départ plutôt hostile à Pékin. Il a cependant vanté les mérites des divers gouvernements libéraux depuis Pierre Elliott Trudeau, qui avait rétabli les relations diplomatiques avec la Chine en 1970 - avant même les États-Unis.