Le profond malaise ressenti par les Canadiens face au sort que l'on a réservé aux Autochtones dans le passé ne devrait pas les empêcher de regarder la vérité en face, estime le président de la Commission de vérité et réconciliation dont le rapport très attendu sera déposé mardi.

Selon le juge manitobain Murray Sinclair, le temps des excuses est écoulé. Il faut maintenant changer les comportements.

«On peut bien sûr atteindre la vérité et exprimer ses excuses par l'entremise de mots, de mots importants. Mais ensuite, la prochaine étape, la réconciliation ne peut s'accomplir que par des actes».

Le juge Sinclair soutient que les histoires d'horreur entendues sur les pensionnats autochtones, lors des audiences de la commission, devraient plutôt servir de base à des initiatives tournées vers l'avenir - notamment dans les écoles du pays.

«Plusieurs des histoires que les «survivants» nous ont racontées demeurent difficiles à entendre ou même à comprendre, mais on ne doit pas laisser cet inconfort nous empêcher d'accepter la vérité. Au contraire, il doit nous guider pour ce que nous ferons à l'avenir.»

Environ 150 000 enfants des Premières Nations, Inuits et métis ont été enlevés de leur famille et contraints à fréquenter des pensionnats. Environ 80 000 d'entre eux sont encore en vie.

M. Sinclair doit déposer son rapport final mardi, après cinq ans d'audiences et de travaux de la Commission de vérité et réconciliation, mais des événements ont déjà eu lieu au cours des derniers jours à Ottawa pour souligner son dévoilement. Dimanche, une Marche pour la réconciliation a attiré à Gatineau et Ottawa des centaines de participants - autochtones et non autochtones.

Lundi, des centaines de survivants de ces pensionnats fédéraux pour Autochtones étaient réunis dans un hôtel d'Ottawa pour regarder vers l'avenir.

Ainsi, le ministre de l'Éducation des Territoires-du-Nord-Ouest, Jackson Lafferty, a rappelé qu'il existait un curriculum sur les pensionnats et l'héritage qu'ils ont laissé, et que ce curriculum pouvait être remis d'ores et déjà à toutes les écoles du pays. «Il ne peut y avoir de réconciliation sans éducation», a-t-il affirmé. Nous sommes prêts à offrir de la formation pour les enseignants qui doivent vivre avec ce traumatisme lorsqu'ils donnent un cours. C'est un sujet très délicat et très émotif.»

L'écrivain Joseph Boyden et Sharon Johnston, la femme du gouverneur général, ont été nommés témoins honoraires. Ils rejoignent quelque 80 autres personnes dont la mission est de porter le message de la Commission partout dans le monde.

«Les événements de la semaine à venir ne signifient pas que tout a été accompli. Les choses ne font que commencer pour les Canadiens au sujet de notre histoire», a dit M. Boyden, qui compte raconter indirectement les répercussions du système des pensionnats dans son prochain roman.