Il est «difficile» pour les démocraties de préserver les libertés individuelles et d'assurer la sécurité publique face à la menace du terrorisme, mais «c'est une exigence», a souligné vendredi à Montréal la ministre française de la Justice, Christiane Taubira.

Mme Taubira donnait une conférence de presse après s'être adressée à la faculté de droit de l'Université de Montréal sur le thème «Libertés individuelles et lutte contre le terrorisme».

«N'attendez pas que je vienne vous dire que c'est facile, qu'on a trouvé la solution juste en claquant des doigts, qu'il n'y a aucun risque (...), puisque je vous dis que c'est difficile», a dit la ministre.

«En même temps, c'est une exigence, il nous faut assurer la sécurité des Français, c'est notre responsabilité», a-t-elle ajouté en défendant le projet de loi sur le renseignement, actuellement en première lecture à l'Assemblée nationale française et qui suscite des oppositions de tous bords.

Elle a aussi évoqué le débat en cours au Canada autour d'un projet de loi (C-51) controversé qui accroît significativement les pouvoirs de dix-sept organismes en matière de renseignement et de surveillance, et qui est fortement critiqué par l'opposition et les défenseurs des droits humains parce qu'il ne prévoit pas de contrepoids supplémentaires des organismes de contrôle.

«Le Canada construit ses propres réponses. Maintenant, je pense qu'il y a dans la société, aussi bien canadienne que française, des forces de vigilance, des structures, des institutions mêmes de contrôle qui s'assurent que la balance est bien faite entre la nécessité de protéger en assurant la sécurité et la nécessité de préserver les libertés».

«On ne veut pas dénaturer nos démocraties, nos États de droit», «nous voulons faire cela de la façon la plus sérieuse et responsable possible», mais «c'est délicat», a-t-elle convenu.

Elle croit cependant que le gouvernement français, qui a décidé de légiférer sur le renseignement bien avant les attentats de Paris en janvier, est en bonne voie de «trouver la juste mesure» avec son projet de loi, même si elle n'écarte pas qu'il soit «ajusté».

Elle a notamment défendu la nécessité d'intervenir auprès des opérateurs télécoms pour la collecte de renseignements sur internet en expliquant que «cet espace de liberté absolument phénoménal» ne devait pas devenir «un lieu d'impunité».

Dans son déplacement de trois jours au Canada, Mme Taubira a notamment signé à Ottawa un accord de coopération en matière de renseignements avec le ministre de la Sécurité publique, Steven Blaney.