Celui qui est connu pour être le père de la politique étrangère du Québec, Paul Gérin-Lajoie, se dit profondément « inquiet » que le gouvernement Couillard envisage de diminuer l'enveloppe destinée à la solidarité internationale dans le cadre de sa vaste opération d'austérité budgétaire.

« Je partage l'inquiétude [des organismes qui pourraient être touchés par ces coupes]. Évidemment, la responsabilité première en matière de développement humanitaire et de solidarité appartient au gouvernement fédéral, mais le Québec a quand même un rôle significatif à jouer », a affirmé celui qui a été ministre de l'Éducation sous le gouvernement libéral de Jean Lesage, de 1960 à 1966, en pleine Révolution tranquille.

Alors qu'il recevait cette semaine à Montréal la médaille de l'Assemblée nationale, l'homme de 94 ans n'a pas hésité à envoyer quelques flèches à l'endroit de son ancienne formation politique, en entrevue avec La Presse.

Pour Paul Gérin-Lajoie, l'aide humanitaire aux populations des pays en voie de développement et la sensibilisation des jeunes Québécois aux questions de solidarité internationale sont deux enjeux importants. Président fondateur de la fondation qui porte son nom et qui agit directement dans ces domaines, il a aussi été président de l'Agence canadienne de développement international (ACDI) de 1970 à 1977.

À l'époque où il était à la tête de l'ACDI, explique-t-on sur le site internet de sa fondation, le budget annuel du Canada pour le développement international a bondi de 650 millions de dollars.

FAIRE DISPARAÎTRE L'AIDE QUÉBÉCOISE

Au Québec, l'enveloppe budgétaire destinée à la solidarité internationale - qui touche essentiellement le financement des programmes d'éducation destinés aux écoles de la province et l'aide humanitaire non urgente - est bien plus modeste : elle atteint 3 millions de dollars. Selon ce que révélait La Presse mardi dernier, ce montant pourrait être réduit d'environ 10 % dans le cadre de la révision des programmes.

« Nous sommes très préoccupés. Nous avons appris cette information entre les branches que ces coupes toucheraient tous les programmes, même les plus petits. Réduire cette enveloppe, c'est pratiquement faire disparaître l'aide à la solidarité internationale au Québec », avait affirmé Denis Labelle, président de l'Association québécoise des organismes de coopération internationale (AQOCI).

Si le ministère des Relations internationales va de l'avant avec cette idée, la ministre Christine St-Pierre ne pourra pas compter sur Paul Gérin-Lajoie pour l'appuyer dans sa démarche.

« Le rôle du Québec sur la scène internationale doit être maintenu. [...] J'espère profondément que nous maintiendrons notre aide pour la solidarité internationale, mais plus encore, que nous allons la développer », a-t-il affirmé.

PAUL GÉRIN-LAJOIE EN BREF

Né à Montréal, le 23 février 1920.

1960-1966: premier titulaire du ministère de l'Éducation du Québec, vice-premier ministre et ministre de la Jeunesse.

Instigateur des premières initiatives du gouvernement du Québec sur la scène internationale.

Son discours le plus célèbre, énonçant ce qui est aujourd'hui appelé la « doctrine Gérin-Lajoie », a été prononcé en avril 1965 devant le corps consulaire à l'hôtel Windsor, à Montréal.

1970-1977: président de l'Agence canadienne de développement international (ACDI).

Membre du Barreau du Québec, il est aussi titulaire d'un doctorat en droit constitutionnel de l'Université d'Oxford, en Angleterre, ainsi que de 13 doctorats honoris causa.