Comportements inacceptables, blessures, fatigue extrême. Mais aussi beaucoup de courage et de solidarité. Trente jeunes de la DPJ ont vécu leurs lots d'épreuves lors de la Course au secondaire du Grand Défi Pierre Lavoie, le week-end dernier. Ces jeunes abonnés à l'échec et aux déceptions ont-ils réussi à courir 270 km à relais en 24 heures? Récit d'une fin de semaine qui marquera leur vie.

Samedi, 4h du matin, Montréal

Il fait toujours nuit lorsque les adolescents arrivent par petits groupes dans le stationnement du Mont Saint-Antoine, centre de réadaptation pour garçons dans l'est de Montréal. Les jeunes de Cité des Prairies - centre pour les cas les plus lourds - grillent déjà leur première cigarette.

Certaines filles sont déjà bien réveillées: «C'est quoi, le nom de celui-là?», dit l'une d'elles en montrant un gars de Cité tout en mimant un geste sexuel explicite. La plupart vivent dans des centres de réadaptation non mixtes. Ceux qui souffrent des troubles de comportement les plus graves ne sortent pratiquement jamais en société.

7h40, Québec

À 20 minutes du départ, les jeunes sautillent sur place pour se réchauffer. Massés sur la place de l'Assemblée nationale, ils scandent le nom de leur école respective. Le groupe de la DPJ, lui, n'a pas envie de hurler «centre jeunesse de Montréal» à tue-tête. L'un d'eux a une idée: «Let's go, 106!», scande-t-il. Les autres l'imitent. C'est le numéro de l'autocar dans lequel ils se déplacent pour faire les relais.

8h, Québec

Les yeux de Daven* s'écarquillent lorsqu'il voit Pierre Lavoie arriver sur les lieux à bord d'un hélicoptère. Les derniers hélicoptères qu'il a vus, c'était ceux de l'ONU lorsqu'il a été forcé de quitter Haïti après le tremblement de terre de 2010. L'adolescent - un fugueur en série qui est négligé par sa mère - dédie sa course à la nièce de son éducatrice au centre de réadaptation. La petite est morte il y a un mois de la maladie orpheline qui a emporté deux enfants de Pierre Lavoie.

LE DÉPART

«On a peut-être notre premier cas de fugue», lance une éducatrice.

Il n'est pas 8h30, samedi matin. Le groupe vient de courir sa première tranche de 2,3 km en peloton dans les rues du Vieux-Québec. Il reste 268 km à faire.

Vingt-neuf jeunes sont de retour dans l'autocar. Ils devraient être trente. Les éducateurs refont le décompte.

Hakim* manque à l'appel. C'est l'un des adolescents placés au centre de réadaptation Cité des Prairies. Il en est à son troisième séjour à Cité pour des fraudes. Il s'est déjà enfui de l'établissement qui a des allures de prison avec ses hautes clôtures et ses portes verrouillées.

Une responsable part à vélo à sa recherche. Elle finit par le trouver un kilomètre ou deux plus loin à la fin de la lignée des autocars garés pour attendre les coureurs. L'adolescent explique qu'il a distancé son groupe, emporté par la vitesse du peloton de tête. On lui donne le bénéfice du doute.

«Ce serait con de m'évader. Ma peine finit dans 10 jours», dit l'adolescent, sur la défensive. Sa réinsertion est commencée et il a trouvé un emploi de vendeur à commission. Pas question de tout bousiller.

«L'argent m'a rendu fou. Ce sont les aléas de la vie», lance le jeune fraudeur, un brin philosophe.

Risques calculés

N'empêche, les éducateurs poussent un soupir de soulagement. Ils prennent des risques en sortant ces jeunes de l'environnement encadré et sécurisé dans lequel ils sont placés. Ces adolescents ont été négligés, battus, violés. Plusieurs accumulent les échecs. D'autres ont sombré dans la délinquance. Ils sont trop dangereux ou trop poqués pour vivre en société.

Cela dit, les risques sont calculés. Pour le Grand Défi Pierre Lavoie, le rapport est d'un accompagnateur pour trois jeunes. Dans l'autocar, les organisateurs ont pris soin de mettre les filles à l'arrière et les garçons à l'avant, afin de limiter les tentations de ces jeunes qui vivent dans des centres de réadaptation non mixtes.

«Souvent, les intervenants craignent de sortir du centre avec les cas lourds. Ils trouvent ça trop explosif, raconte l'éducateur Michel Brière.

«Moi, je pense que nos jeunes doivent sortir et vivre des expériences parce qu'à 18 ans, ils vont retourner en société. Et là, la marche va être haute à monter. Très haute.»

Patrice* l'a déjà menacé de l'enculer avec un balai lorsqu'il était en crise dans sa chambre. «Sors, sinon je te mets», lui a-t-il lancé.

L'adolescent qui vit en institution depuis sa petite enfance est un as de la provocation. Il se sert de sa longue expérience en centre pour coincer les nouveaux employés; les prendre en défaut dans leur intervention. «Il cherche la faille chez les adultes et il la trouve facilement», résume l'éducateur.

Au début de la course, Michel distribuait les tapes dans le dos. Malgré ce que Patrice lui a fait endurer dans le passé, il reçoit ses encouragements comme les autres. «Ils ont vécu plus d'épreuves dans leur vie que n'importe lequel des adultes ici et, dans certains cas, que tous les adultes réunis», souligne l'éducateur qui se targue d'avoir le meilleur job du monde.



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GESTION DE CRISE

Samedi, 14h, près de Deschambault-Grondines.

Denis* ne tient plus en place. Il dérange les autres assis autour de lui dans l'autocar. Les éducateurs ont beau l'avoir fait changer de siège plusieurs fois, rien n'y fait. Et son tour de prendre le relais est encore loin.

Une éducatrice allume. «Ceux qui avaient de la médic à prendre ce midi, l'avez-vous prise?»

Les adolescents répondent oui en choeur. Au moins le tiers du groupe prend de la médication pour maîtriser un trouble du déficit de l'attention.

Un autre éducateur a des soupçons concernant Denis. Il l'amène à l'écart et décide de fouiller ses affaires. Le sac en papier contenant ses comprimés est toujours agrafé.

«Ça ne t'aide pas si tu mens, Denis. Moi, je veux qu'on finisse la run ensemble», lui dit Martin Paré, intervenant spécialisé en gestion de crise. Denis proteste beaucoup. «Ça ne m'aide pas, cette pilule-là.»

Le garçon est attachant, mais très impulsif. Ses parents l'ont laissé tomber tellement souvent. Sa mère lui donne des nouvelles quand ça lui chante. Son père oublie souvent des rendez-vous cruciaux pour son fils.

Il a même oublié son anniversaire. Denis est méfiant envers les adultes.

L'éducateur insiste pour qu'il prenne sa médication. «Je ne suis pas fâché contre toi. Je veux que tu termines le défi et que tu sois fier.»

L'adolescent de 14 ans se tortille sur son siège. Il regarde au sol et finit par mettre la pilule dans sa bouche. Sauf qu'il fait seulement semblant de l'avaler.

«Ouvre la bouche et lève ta langue, lui ordonne l'intervenant. Je sais que c'est difficile, mais je ne veux pas que tu rentres à l'unité [son groupe au centre de réadaptation] avant la fin.»

Denis finit par obtempérer.

L'intervenant devance le tour de Denis au relais pour lui permettre d'évacuer son trop-plein d'énergie. L'adolescent qui ne semble pas encore sorti de l'enfance démarre son chronomètre avant de s'élancer. Avec son coéquipier, il court 1 km en 7 minutes. Au moment de passer l'anneau qui sert de relais, il tombe à genoux. Mission accomplie. Il rentre calmement dans l'autocar sous les applaudissements des autres adolescents.

16h40, Sainte-Anne-de-la-Pérade

Hakim* a réussi à trouver le code de l'internet sans fil offert dans l'autocar. Le hic: les jeunes n'avaient pas le droit d'apporter de cellulaire. Et encore moins d'aller sur le web. Les jeunes de la DPJ ne sont pas différents des autres adolescents. Ils veulent être sur Facebook, Instagram et les autres réseaux sociaux. Mais pour des raisons de confidentialité, ils ne peuvent être reconnus. S'ils s'identifient, leurs amis et eux confiés à la DPJ, sur des photos dans le cadre d'activités du centre jeunesse, ils enfreignent la loi.

18h20, Batiscan

Après plus de 12 heures dans l'autocar, les jeunes commencent à en avoir assez. C'est que seuls deux coureurs s'élancent à la fois. Les autres attendent leur tour assis dans un véhicule qui est de plus en plus malodorant. Pour augmenter leur motivation, les éducateurs décident de les faire courir un gars, une fille. Les sourires réapparaissent sur les visages. Les gars lancent même un concours de danse improvisée dans le couloir étroit de l'autocar, en alternant vieux succès de Michael Jackson et Eminem.

19h30, près de Trois Rivières

« On a une situation », dit un éducateur à un autre sur un ton grave.

Les éducateurs trouvent que deux adolescents qui ne se connaissaient pas il y a quelques heures à peine commencent dangereusement à se rapprocher. La fille est en train de jouer dans les cheveux du garçon sous le regard envieux d'autres jeunes.

Lorsqu'un éducateur demande au garçon de changer de place, il répond: «Viens me chercher», sur un ton baveux. L'adolescent est convoqué sur-le-champ à l'avant de l'autocar où l'intervenant en situation de crise, Martin Paré, l'attend.

Ces adolescents sont des bombes à retardement. Un incident banal peut être l'étincelle qui déclenche une explosion.

« Je peux comprendre que tu trouves une fille intéressante, mais c'est un défi de course. Pas un défi de cruise », lui dit M. Paré. Il l'avertit qu'il ne veut pas jouer à la police.

L'adolescent prend un air contrit. «Ça fait huit mois que je m'entraîne, je ne veux pas gâcher ça», répond-il. Le jeune emprunte un langage appris en centre de réadaptation. «J'ai des problèmes de gestion d'émotion.» Il jure qu'il n'ira pas plus loin avec la fille.

L'adolescente est convoquée à son tour. Elle a un capuchon bien enfoncé sur la tête. «Je n'étais pas en train de le violer», dit-elle, sur la défensive.

«C'est correct que tes hormones te travaillent, mais ce n'est pas le moment ni l'endroit», lui explique calmement l'intervenant. L'adolescente répète qu'elle n'a pas envie de parler. «Je n'ai rien à faire», se plaint-elle.

L'intervenant en gestion de crise saisit la balle au bond et l'envoie courir 2 km. Un relais qui sert à évacuer les tensions.

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«[Ces jeunes] ont vécu plus d'épreuves dans leur vie que n'importe lequel des adultes ici et dans certains cas, que tous les adultes réunis.» - Michel Brière, éducateur.

NUIT ET JOUR

Samedi, 19h50, près de Trois-Rivières

La fatigue se fait sentir. Un ado qui fait un relais se blesse en essayant de dépasser un autre coureur. L'ambulance le ramasse sur-le-champ. Il en est quitte pour un genou et un coude amochés. Une fille se foule la cheville. Plusieurs ont mal à la tête. Ils oublient de s'hydrater.



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22h, Trois-Rivières

Les coureurs ont droit à une pause jusqu'à minuit. Les jeunes de la DPJ sont massés très loin de la scène où Les Trois Accords donnent un spectacle. Patrice* n'a jamais vu un show de sa vie. Plusieurs d'entre eux ne sont même jamais sortis de leur quartier. Les ados préfèrent danser en cercle en faisant leurs propres beats. Ils s'amusent comme des fous. Les éducateurs ne les quittent pas des yeux une seconde. «Tout peut arriver», nous dit une accompagnatrice.



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Dimanche, minuit, Trois-Rivières

Les plus motivés du groupe vont courir 7 km dans les rues de Trois-Rivières. Parmi eux, Denis* qui avale les kilomètres depuis le début du Grand Défi. La majorité du groupe décide de se reposer dans un gymnase de l'université locale. Les néons n'empêchent pas les plus fatigués de faire une sieste. Personne n'a dormi depuis le départ de Montréal à 4h du matin la veille.



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5h, quelque part sur la 132

Paul*, 16 ans, est le G.O. du groupe. Il blague tout le temps, même à l'aube. Sa mère vit en Haïti; son père, aux États-Unis. Sa soeur aînée, qui a la garde de l'ado à Montréal, le corrigeait pour un oui ou pour un non. «Ça ne me manque pas», dit Paul qui vit en centre de réadaptation depuis un an. Sa mère se meurt d'un cancer. Il voudrait aller la voir avant qu'il ne soit trop tard. Il n'a pas de passeport. Ni d'argent. Mais il jure qu'il va tout faire pour s'y rendre à temps.

6h30, près de Yamaska

Hakim* a pris le relais toute la nuit. Il n'a pas dormi une seconde dans les 24 dernières heures. Il est encore en forme. À ce relais-ci, l'ado accélère en regardant le chauffeur de l'autocar qui roule à ses côtés comme pour lui lancer un défi. Il maintient la même vitesse que le véhicule - 12 km/h - durant plus d'un kilomètre. Il vient d'hériter du surnom de gazelle.





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L'ARRIVÉE

Dimanche, 12h30, Verchères

Pierre Lavoie et l'acteur Guillaume Lemay-Thivierge courent quelques mètres avec les jeunes de la DPJ. Les gars rivalisent de poignées de main viriles avec les deux hommes. Les ados boivent les paroles du fondateur du Grand Défi. «L'important, ce n'est pas la vitesse, c'est de franchir la ligne d'arrivée», leur répète l'athlète. Paul*, qui a un physique d'athlète, blague avec lui. «Il est cool quand même. Il est drôle et souriant comme moi», dit l'ado en bombant le torse.

13h, pause à Verchères

Les jeunes signent le chandail souvenir du Grand Défi de leurs coéquipiers. «Ils ont compris qu'ils forment un tout», se félicite l'éducateur Michel Brière. Mais l'éducateur ne baisse pas sa garde. De retour dans l'autocar, il constate que les crayons-feutres ont disparu. «Il y a des crayons qui circulent», dit-il sur un ton grave comme si c'était des armes blanches. Les éducateurs font le tour des jeunes pour les récupérer, question d'éliminer rapidement la tentation du vandalisme.

14h, Rive-Sud de Montréal

L'air conditionné ne fonctionne plus. L'autocar est un véritable four. «C'est intenable. En arrière, vous allez mourir de chaleur», lance la responsable des communications, Julie Grenier, l'air inquiète. Les jeunes, généralement contestataires, ont peu de réactions. Les éducateurs craignent des pertes de conscience. Il reste plusieurs relais avant d'atteindre le Vieux-Port. Le groupe devrait passer encore au moins une heure dans l'autocar avant de franchir le fil d'arrivée. Trop risqué. Les éducateurs décident qu'ils ne termineront pas la course.

15h, Montréal

Le groupe rentre au centre du Mont Saint-Antoine sans broncher. Les ados ont les traits tirés. Certains boitent ou portent des pansements. Peu importe qu'ils n'aient pas rallié l'arrivée, ils ont avalé de nombreux kilomètres en équipe. Avant de prendre le chemin de leur centre de réadaptation respectif, l'un d'eux entonne leur cri de ralliement une dernière fois: «Let's go 106» faisant référence au numéro de l'autocar. Plusieurs se promettent déjà de refaire le Grand Défi l'an prochain.

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Personne n'a abandonné, mais ça n'a parfois tenu qu'à un fil.

Denis* a «pété plusieurs coches», souvent pour des détails anodins.

Les lunchs étaient trop «santé» à son goût, notamment les sandwichs à la luzerne et la salade de quinoa. «Je suis tanné de manger du gazon puis des affaires que je ne connais pas, ostie.»

Les toilettes de fortune installées sur certains sites l'ont aussi mis hors de lui. Il s'agissait de simples seaux tenus en place par des pneus.

«Je ne vais pas m'asseoir sur un pneu plein de marde. Je vais pogner le sida criss», a lancé l'ado de 14 ans en colère.

«Puis Denis, es-tu fier de toi?», lui demande-t-on à la fin du Grand Défi. C'est là que le garçon sort un bout de papier sur lequel il a inscrit tous ses temps de relais. La seconde journée de course, il a fait la paire avec le jeune fraudeur Hakim* -surnommé la Gazelle - qui l'a pris sous son aile. «À mes premiers relais, je faisais un kilomètre en sept minutes. Avec Hakim, j'ai baissé à 4 min 30», dit-il, une lueur dans les yeux.

Imran, un fumeur avec un surplus de poids, a trouvé l'épreuve beaucoup plus difficile qu'il ne l'imaginait. Le jour, la chaleur le ralentissait beaucoup. «J'ai préféré courir la nuit. C'était tellement calme et frais», dit l'ado de 17 ans. Le chemin du Roy emprunté par les coureurs offrait tout un contraste avec son quartier pauvre et multiethnique de la métropole. Imran n'était jamais allé à la campagne.

Nathalie a reçu une mauvaise nouvelle à quelques jours du Grand Défi. Un juge a repoussé de plusieurs mois sa décision concernant l'avenir de l'adolescente. Nathalie lui a demandé de vivre en centre jeunesse jusqu'à ses 18 ans. Fille d'un père hyper contrôlant passé maître dans la violence psychologique et d'une mère trop docile, l'ado voudrait les rayer de sa vie le plus vite possible. Elle ressent des douleurs à un genou qui l'ont ralentie durant la course. «Je me dis que je vais bientôt me faire frapper par la foudre», lance-t-elle, mi-sérieuse. L'ado a réussi à oublier ses parents le temps d'un week-end.

Élisabeth, cette ado qui compare son foyer de groupe à un refuge pour chiens abandonnés, est arrivée au Grand Défi mal en point. En plus d'une élongation musculaire à un mollet, elle avait une toux si creuse qu'elle a dû consulter le service médical fourni sur place. Diagnostic: possible bronchite. L'ado de 15 ans s'est mise à pleurer. «Je suis tellement déçue de moi. Je me suis beaucoup entraînée. Je ne veux pas lâcher.»

L'ado de 15 ans a choisi de diminuer son nombre de relais plutôt que de quitter le groupe. Des abandons, cette enfant née avec de l'héroïne dans le sang en a trop vécu. Elle n'en peut plus.

*Les prénoms sont fictifs; leurs histoires ne le sont pas.

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