Les centres de femmes de plusieurs régions du Québec disent avoir recueilli «plusieurs dizaines» de témoignages de femmes, en majorité musulmanes, qu'on aurait insultées, bousculées ou agressées dans l'espace public.

«On a des échos de ça dans plusieurs régions du Québec. On parle de plusieurs dizaines d'incidents. Des propos haineux, racistes. Des commentaires xénophobes. Parfois les femmes se font bousculer, cracher au visage. Donc, on parle parfois d'incidents de nature violente», dit Valérie Létourneau, porte-parole du Regroupement des centres de femmes du Québec.

La semaine dernière, les centres de femmes ont tenu une réunion où la question a été longuement abordée. «Pour nous, c'est clairement lié au débat sur la charte. Il y a une augmentation dramatique de cas à l'endroit des musulmanes voilées. Nos centres vivent un débordement», dit Mme Létourneau.

De nombreux incidents ont été signalés dans les centres de Montréal, mais aussi en région, précise-t-elle. Des agressions seraient notamment survenues en Gaspésie et en Estrie.

«Depuis le début des débats entourant le projet de Charte, la sécurité des femmes est compromise», renchérit Angèle Laroche, présidente du regroupement. Elle lance un appel à la population, au gouvernement, et aux médias. «Il faut que cessent toutes manifestations d'intolérance, de racisme et de violence. Que les discussions se poursuivent, mais qu'elles ne mettent pas en péril la sécurité des femmes.»

Réaction à Québec

À Québec, le ministre responsable des Institutions démocratiques et de la Participation citoyenne, Bernard Drainville, a condamné les agressions contre les femmes voilées. «Ces gestes d'intimidation ou même pire encore sont tout à fait inacceptables, tout à fait condamnables. (...) On n'a aucune tolérance pour ce genre d'incidents. Il faut se respecter, respecter l'autre, y compris les personnes qui portent des signes religieux. Elles dont le droit de porter des signes religieux», a-t-il affirmé, à l'entrée de la réunion hebdomadaire du conseil des ministres.

L'auteur du projet de charte des valeurs québécoises nie avoir une part de responsabilité dans ces dérapages. «Le débat sur la charte des valeurs est un débat nécessaire. Ça fait trop longtemps qu'on repousse sous le tapis tous ces enjeux d'accommodements religieux. Et il est temps de faire de débat sur la neutralité religieuse au Québec», a-t-il répondu. Selon lui, «de façon générale», le débat se fait «très bien», «dans le calme et le respect».

Il croit également que la charte va contribuer à la paix sociale.  «Ce débat, à terme, va nous permettre de ramener beaucoup plus d'harmonie, va générer beaucoup moins de tensions que ce qu'on a connu par le passé et va aussi créer de la cohésion au sein de la société québécoise.»