La dame de béton refuse de s'engager dans un bras de fer avec l'industrie de la construction et persiste à privilégier la voie de la négociation pour mettre un terme à la grève qui dure depuis maintenant neuf jours.

Ainsi, plutôt qu'une loi spéciale pour forcer le retour des travailleurs sur les chantiers, la première ministre Pauline Marois a choisi de nommer un médiateur spécial, lundi.

Une entente est intervenue dans les secteurs du génie civil et de la voirie, et les discussions se poursuivent avec les représentants du secteur résidentiel, mais l'impasse persiste dans les secteurs industriel, commercial et institutionnel.

«Il y a des blocages, a reconnu Mme Marois au cours d'un point de presse. Ils sont apparus ce matin au moment des derniers échanges.» Elle s'en remet maintenant au médiateur, l'ancien sous-ministre du Travail Normand Gauthier, qui a une semaine pour dénouer le conflit.

Mme Marois repousse ainsi le recours à une loi spéciale. «Ce serait après la semaine prochaine ou la fin de semaine prochaine, a-t-elle prévenu. C'est sûr qu'après une dizaine de jours de grève, de jours ouvrables, c'est absolument le dernier délai à ne pas dépasser.»

Pourtant, il y a quelques jours, la première ministre espérait encore un règlement avant son départ pour le Mexique mercredi.

Reproches de part et d'autre

L'Alliance syndicale a aussitôt fait savoir qu'elle comptait collaborer avec le médiateur, mais elle a affirmé du même souffle que sa position ne changera pas, tout en dénonçant la «mauvaise foi» de l'Association de la construction du Québec (ACQ).

«Les demandes patronales sont restées intactes. Le travail le samedi, l'élargissement de la plage horaire, le temps et demi [les heures supplémentaires] et la mobilité provinciale sont inacceptables pour nos travailleurs», a expliqué Yves Ouellet, porte-parole de l'Alliance.

En matinée, l'ACQ dénonçait de son côté «l'entêtement des syndicats» et déclarait ne pas avoir d'autre choix que d'envisager la loi spéciale. Mais en fin de journée, l'Association a assuré qu'elle collaborerait à la médiation.

Les deux partis s'entendent donc sur une chose: la négociation est préférable à une loi spéciale. Mme Marois a également défendu cette voie en s'appuyant sur l'entente survenue lundi matin dans le secteur du génie civil.

Les représentants des patrons et des syndicats se sont entendus sur des augmentations salariales de 2% cette année et des hausses de 0,1% les années suivantes, pour atteindre 2,3% la quatrième année. L'entente de principe doit maintenant être approuvée par les syndiqués et les membres de l'Association des constructeurs de routes et grands travaux du Québec.

L'opposition demande une loi

De leur côté, les partis d'opposition ont dénoncé le manque de leadership de Mme Marois.

«Tant mieux s'il y a une entente dans le génie civil, mais il faut réaliser que ça ne touche que 40 000 des 175 000 travailleurs en grève, a affirmé le chef du Parti libéral du Québec, Philippe Couillard. Et le gros des emplois et des investissements est du côté des secteurs qui ne sont pas près d'un règlement.» M. Couillard a rappelé qu'il réclamait déjà la semaine dernière l'intervention d'un médiateur, assortie d'un échéancier de quatre jours.

«On ne peut pas tolérer une deuxième semaine complète de grève», a pour sa part critiqué le chef de la Coalition Avenir Québec, François Legault. On souhaite toujours une négociation, mais il faut un échéancier clair. Mme Marois a parlé du début de la semaine et maintenant elle parle d'une semaine de plus... Comment voulez-vous que les négociateurs la prennent au sérieux?»

Les deux partis de l'opposition exhortent la première ministre à convoquer rapidement les députés pour voter une loi spéciale.