Une laveuse, une sécheuse, deux téléviseurs, du mobilier de jardin en fer, un réservoir à eau chaude, un réfrigérateur et trois batteries d'automobile: la cueillette a été bonne, la veille, pour Patrick Vachon, propriétaire de l'entreprise de recyclage Empire.

Lui et son collègue Sébastien Girondeau ont ramassé ces métaux dans la rue, à la veille du passage des éboueurs.

Dans le milieu, on appelle ça «faire la run» ou les poubelles.

Les deux hommes se déplacent aussi sur appel. Patrick, une armoire à glace de 26 ans, possède deux camions lettrés. Il a démarré sa propre entreprise il y a trois ans.

La saison haute est l'été, et elle culmine le jour du déménagement. Pour Patrick, les affaires n'arrêtent jamais. «Les vrais continuent l'hiver et les autres font relâche», résume-t-il.

Les autres? «Ceux qui s'improvisent ferrailleurs pour arriver à la fin du mois, à bord de leurs voitures, souvent sans équipement.»

On les voit tournoyer dans les rues à la tombée du jour, parfois même en vélo.

Plusieurs touchent l'aide sociale et ne déclarent pas leurs revenus.

Il y aurait presque autant de ferrailleurs de métier que de ferrailleurs du dimanche. Chez le recycleur Phénix Métal, on recense une quarantaine de clients réguliers, qui viennent environ deux fois par jour, et une centaine qui viennent une fois par mois. La quasi-totalité des ferrailleurs improvisés se concentre sur les poubelles.

Patrick démarre sa scie mécanique pour sectionner à mains nues le mobilier de jardin en fer afin de maximiser l'espace dans sa fourgonnette. Les flammèches volent dans tous les sens.

Les enfants, de l'autre côté de la rue, se bouchent les oreilles avec leurs mitaines.

Une fois la marchandise chargée, en route vers le recycleur. Il en existe plusieurs dans les environs. Les prix sont sensiblement les mêmes partout, et sont fixés par le marché. Les recycleurs vendent ensuite les métaux à des entreprises qui s'occupent de les faire fondre, avant de les exporter sous diverses formes à leurs clients éparpillés dans le monde.

À l'entrée du recycleur lavallois, Patrick immobilise son véhicule sur une plaque pression - une balance. Le véhicule, ses passagers et sa cargaison pèsent un peu plus de 7000 lb.

Les deux hommes déchargent et décortiquent le matériel. D'abord le métal mixte dans la cour arrière, où s'élèvent des montagnes de laveuses, de sécheuses, de tôles, d'aluminium, de bases de lit, de clôtures en fer, etc. Le prix du métal mixte oscille autour de 160$ la tonne (2200 lb).

Patrick s'empare d'un marteau et se met à massacrer la laveuse pour en extirper le moteur en cuivre.

Le camion s'engouffre ensuite dans un garage dans lequel on entrepose les métaux non ferreux.

Le cuivre, l'aluminium, l'acier inoxydable y sont pesés.

Avant de partir, Patrick pèse de nouveau son camion, avec le même nombre de passagers. On soustrait du poids le volume de métaux non ferreux et on obtient finalement celui des métaux mixtes. Patrick quitte le recycleur avec un peu moins de 200$.

Mais le moyen le plus fiable pour faire de l'argent demeure le travail sur appel. Les trois escaliers en fer forgé de ce commerce - jugés non conformes par les pompiers - font le bonheur des deux ferrailleurs.

Deux heures de dur labeur à la scie mécanique qui leur donnera environ 125$ de métal.

Ils retourneront vider la marchandise chez le recycleur, avant de reprendre la run le soir venu, dans un quartier résidentiel.