La mort de Michel Berniquez, survenue en 2003 à Montréal-Nord lors d'une arrestation musclée, aurait possiblement pu être évitée avec les connaissances médicales actuelles.

À l'époque, ce «décès accidentel» causé par de multiples facteurs, dont l'arrestation elle-même, était «difficilement évitable», selon le rapport d'enquête de la coroner chargée de faire la lumière sur cet événement. La Presse a obtenu le document, qui sera dévoilé aujourd'hui.

La coroner Andrée Kronström y affirme aussi que les policiers doivent être mieux formés pour reconnaître les personnes sous l'emprise d'un délire agité - un mal qui peut affecter certains toxicomanes.

Mort controversée

La mort de Michel Berniquez a soulevé la controverse, il y a près de 10 ans. Sa famille et des groupes de lutte contre les abus policiers ont dénoncé l'emploi d'une force abusive contre la victime, un toxicomane parfois «violent et agité» aux prises avec des problèmes de santé mentale.

«En plus de la force excessive, c'était un acte criminel. Il y a quelqu'un qui ne s'est pas contrôlé», affirme encore aujourd'hui Yves Manseau, militant qui a pu intervenir dans l'enquête publique.

Lui et la famille Berniquez sont persuadés qu'un des policiers qui a pris part à l'intervention a roué la victime de coups à la tête avant sa mort.

Une enquête publique a été ouverte en 2005, mais son travail n'a réellement commencé que l'an dernier. Le rapport de la coroner Kronström constitue la conclusion de cette enquête.

Arrestation musclée

Le 28 juin 2003, M. Berniquez était sous l'effet de la «cocaïne et de méthamphétamines», selon le rapport. Lorsque des policiers l'ont intercepté, il venait de donner sans raison un coup de poing à un passant et avait tenté de voler des biens dans un dépanneur. Un combat a suivi. Selon la version des policiers, Michel Berniquez semblait insensible à la douleur et doté d'une force anormale.

Toujours selon les policiers, la victime a été maintenue sur le ventre par plusieurs policiers pendant plus d'une dizaine de minutes, parce qu'elle se débattait.

Peu après l'arrivée des ambulanciers, «tous constatent que M. Berniquez est inerte. Un court examen physique confirme qu'il est en arrêt cardiorespiratoire. Son corps est mou, chaud et humide», écrit la coroner dans son rapport.

Délire agité

La majeure partie du rapport de la coroner Kronström est consacrée à l'étude du délire agité, un état d'affolement qui n'a été catalogué par la médecine qu'en 2009. Les toxicomanes qui en sont affectés font preuve d'une «agressivité extrême» doublée d'une «force surhumaine» et d'une «insensibilité à la douleur».

«Les effets indésirables sur le coeur et le cerveau sont plus intenses [que lors d'un simple délire] et peuvent conduire à un décès subit», selon une spécialiste consultée par la coroner. Michel Berniquez aurait souffert de ce problème le jour de sa mort.

L'intervention policière, en favorisant l'augmentation du rythme cardiaque de la victime, est un «facteur qui a contribué au décès», conclut la coroner Andrée Kronström, qui croit par ailleurs que les policiers devraient être mieux formés sur le sujet.

Elle avait déjà écarté toute possibilité de blâmer les policiers pour cette mort.