Les gourous dont nous avons parlé dans les deux dernières semaines sont loin d'agir seuls. Jour après jour, de nouvelles victimes nous ont écrit des histoires déchirantes: agression sexuelle, abus de pouvoir, dépenses folles...

Gourous inc.: notre grande enquête

L'une d'entre elles affirme que son agent de libération conditionnelle a exigé qu'elle consulte un charlatan, qui demandait 300$ la séance.

De nombreux parents, frères, soeurs ou conjoints de victimes nous ont parallèlement fait part de leur impuissance. Car les gourous savent très bien diviser pour mieux régner, affirment-ils.

Stéphane Gendron, maire de Huntingdon, est pour sa part excédé qu'une pseudo-guérisseuse de sa ville cause des problèmes de circulation en continuant de recevoir des clients aux 15 minutes dans une zone résidentielle. Et ce, malgré les nombreux avertissements de la Ville, dit-il, et malgré le fait qu'elle doit comparaître pour exercice illégal de la médecine la semaine prochaine.

D'autres lecteurs ont attiré notre attention sur des causes sidérantes. La première concerne une pseudo-psychothérapeute de Saint-Sauveur, Lisette Metayer, qui a plaidé coupable de voies de fait en juin dernier. Jusque-là, la directrice du Centre de formation en approche psychologique et corporelle prétendait que ses actes de violence et ses tentatives d'humiliation étaient formateurs et thérapeutiques. «[Elle] m'a sacré une claque, mes lunettes ont revolé. Je ne voyais plus rien et n'entendais plus d'une oreille. Je me suis débattue, mais elle a continué de me frapper en me disant que j'allais voir ce qu'était la haine maternelle», a raconté une victime au journal Accès Laurentides.

En 2008, la Cour du Québec s'est penchée sur une autre histoire étonnante. D'après le jugement, Christine Nelson, naturothérapeute de Saint-Adolphe-d'Howard, a prétendu détecter un cancer du cervelet chez une cliente. Elle lui a vendu pour 28 000$ de produits naturels et l'a ensuite entraînée au Mexique pour lui faire arracher toutes les dents, en raison d'un prétendu problème de parasites. Au retour, elle l'a aussitôt emmenée dans un chalet, sous prétexte, cette fois, de chasser des toxines. Il a fallu que la pauvre femme, très affaiblie, appelle ses fils au secours pour qu'ils la retrouvent et la conduisent d'urgence à l'hôpital. Pour couronner le tout, elle devait payer les frais de voyage pour deux (une facture de 10 000 à 15 000$). Mais le plus inouï, c'est que Christine Nelson a ensuite eu le culot de la poursuivre pour services impayés. La Cour du Québec a rejeté sa demande avec indignation, en disant que toute cette affaire avait «un relent de spoliation» et que le séjour dans un chalet des Laurentides «ressemblait à de la séquestration».

Des solutions

Dans leurs courriels, plusieurs cherchent à expliquer le phénomène. «Ceux qui offrent ces soins sont aussi des gens perturbés. Se prétendre investi de pouvoirs magiques, c'est une façon de vivre sa psychose dans la société», écrit une lectrice.

Les gourous maîtrisent les techniques d'influence sociale et de lavage de cerveau, a avancé de son côté un ancien professeur de psychologie. «L'opération de contrôle et des manipulations bien ciblées peuvent déstabiliser et détruire une personne normale», prévient-il. Une victime lui a fait écho en écrivant: «Nous sommes tous fragiles à des degrés divers devant la rareté des ressources d'aide.»

L'immense majorité de nos correspondants se disent en tout cas heureux qu'on mette les gens en garde contre les pseudo-thérapeutes. Certains veulent lancer des pétitions, d'autres réclament un durcissement des peines. Une femme a souligné que la pénurie de psychologues dans le secteur public devait être corrigée «pour le bien-être psychique de l'ensemble de la population».

Visalus

Certains ne sont pas du même avis. Un petit nombre de personnes se disent partagées. Elles sont d'accord pour qu'on dénonce les charlatans absolus mais déplorent que leurs actes rejaillissent ainsi sur tous ceux qui travaillent à l'extérieur du cadre de la médecine. Des gens nous ont dit connaître - ou être eux-mêmes - de bons «guérisseurs», dignes de confiance, et qu'il aurait fallu reconnaître l'existence de «miracles inexpliqués».

Une poignée de lecteurs insatisfaits nous ont plutôt écrit pour défendre les méthodes ou les gens que nous avons critiqués depuis deux dernières semaines et pour nous accuser de manquer d'ouverture spirituelle. D'après eux, il aurait été beaucoup plus utile de publier un reportage sur les maux de la médecine officielle.

Nous avons par ailleurs reçu quelques courriels des gens de Visalus, mécontents que le nom de leur entreprise soit associé au chef du groupe La Source, Jean-Claude Gallant, qui n'est qu'un distributeur parmi d'autres dans cette entreprise. Ils ne veulent pas que nos lecteurs croient que leurs activités sont illégales.