Plusieurs Québécois sont morts après avoir boudé des traitements reconnus afin de se remettre entre les mains d'un pseudo-guérisseur.

Leurs histoires font rarement les manchettes, car ils n'y sont plus pour porter plainte. Et lorsque leur famille s'en charge, il est rarissime que la police s'en mêle.

Exception notable : une naturopathe de Wesmount, Mitra Javanmardi, est poursuivie pour homicide involontaire et négligence criminelle. On l'accuse d'avoir tué un homme de 84 ans en lui injectant du magnésium. L'homme, qui lui avait versé 585 $, a vomi, est devenu fiévreux et a fait une crise cardiaque le lendemain.

Malgré ses symptômes, la naturopathe aurait dissuadé sa famille de le conduire aux urgences un conseil qui n'est peut-être pas étranger au fait qu'elle avait déjà été poursuivie trois fois par le Collège des médecins.

Autre cas tragique : François Leduc, ingénieur civil devenu naturothérapeute, a vendu des pilules faites d'huile et d'argile à un homme atteint du cancer de la prostate. Il lui avait dit que la chimiothérapie et la morphine l'empêcheraient de guérir. La tumeur s'est métastasée aux os et son client est mort dans d'atroces souffrances, après avoir étalé du plantain sur ses plaies. Leduc a payé 26 000$ d'amende, mais n'a jamais été emprisonné.

Myriam Villiard, naturopathe et homéopathe, l'a été brièvement. Bien qu'une injonction lui ait interdit d'offrir des traitements, elle venait de soutirer 450 $ par visite à une dame atteinte du cancer de la peau. La femme est morte.

Villiard, qui en était à sa sixième récidive, a ensuite prétendu soigner un enfant atteint d'une maladie rare. Ses parents lui ont versé plus de 1000 $ en produits et analyses, sans succès. Indigné, un juge des petites créances a traité la naturopathe de profiteuse et écrit que rien ne pouvait excuser «ses actes ignobles ».

Sur son site internet, la Commission des praticiens en médecine douce du Québec présente pourtant Myriam Villiard comme l'un « des grands noms qui ont contribué à l'avancement des médecines douces dans notre province ». La Commission n'a pas répondu à nos courriels.

À donner froid dans le dos

En Belgique, Nathalie de Reuck traque des gourous dans le documentaire Mort biologique sur ordonnance téléphonique, qui a été suivi du livre-choc On a tué ma mère ! La journaliste y raconte comment sa mère a découvert une masse dans son sein, et comment des adeptes de la biologie totale lui ont juré qu'elle mourrait si elle allait à l'hôpital. Même lorsque sa tumeur cancéreuse a paralysé et fait gonfler son bras. Même lorsqu'elle a causé une plaie suppurante.

Bonne élève, la vieille dame enregistrait toutes ses conversations pour mieux comprendre. Ce fut son testament. On y entend son gourou la culpabiliser lorsqu'elle se plaint de douleurs insupportables, ou de dépenser beaucoup sans amélioration. « Avec vous, rien ne marche jamais, madame, la blâme-t-il. Vous vous opposez à tout. À quoi ça sert de vous aider si vous ne voulez pas être aidée.»

Il relance pourtant sa cliente jusqu'à l'hôpital, pour lui dire qu'il est fier d'elle, car elle va «partir en harmonie ».

Avant sa mort, Mme de Reuck mère a plutôt demandé à sa fille de porter plainte en lui disant : «Je me suis trompée de chemin. Pardon.»