Les mariculteurs sont aussi nombreux à squatter les terres agricoles du Québec, mais ils le font de manière plus discrète, selon des responsables de l'Union des producteurs agricoles (UPA).

«On en entend juste moins parler parce qu'ils ont raffiné leurs méthodes. Avant, leurs plantations étaient facilement visibles des airs, maintenant elles poussent aux extrémités des bois ou sont éparpillées», constate Jean-Luc Leclair, président de la fédération de l'UPA dans le Centre-du-Québec, historiquement aux prises avec cette «cohabitation» entre les agriculteurs et les mariculteurs.

La marijuana pousse presque toujours tranquillement dans des champs de maïs servant à nourrir les vaches.

L'ensilage - qui consiste à hacher le maïs avant de l'entreposer dans des silos - se fait à l'aide de machinerie agricole. La présence humaine est donc rare dans ces immenses champs.

Les mariculteurs sèment leurs boutures dans des serres, avant de les transférer au printemps dans les champs de maïs, lorsque les plants sont assez hauts pour camoufler la drogue.

À ce temps de l'année, les agriculteurs tombent parfois par hasard sur des plantations, explique M. Leclair.

Pour enrayer le problème, la plupart des agriculteurs de sa région ont signé un contrat social avec la Sûreté du Québec (SQ), qui donne à cette dernière accès sans préavis à leurs terres, de mai à novembre.

Les agriculteurs de toutes les régions de la province ont emboîté le pas en adoptant cette mesure, qui donne plus de dents à la police.

Malgré ces efforts, le problème demeure important, constate M. Leclair. «Beaucoup de producteurs appellent la SQ en cette période, mais la police ne fournit pas. Le contrat social a rassuré certains producteurs, mais la crainte subsiste», résume M. Leclair. Il ajoute que plusieurs agriculteurs préfèrent rester dans l'ombre par crainte de représailles.

Même si les incidents violents et les menaces contre les agriculteurs semblent plutôt marginaux, il est possible qu'ils soient rarement signalés.

La SQ assure qu'elle intervient chaque fois qu'une plantation est signalée. «Si les criminels raffinent leurs façons de faire, nous aussi», affirme la sergente Ingrid Asselin. Elle ne rapporte encore aucun geste d'intimidation à l'endroit des producteurs dans son territoire. «Mais ça ne veut pas dire qu'il n'y en a pas», ajoute-t-elle.

D'ordinaire, les champs sont envahis par deux types de mariculteurs: les jeunes sans expérience et les organisations criminelles. Ces gros joueurs prévoient souvent qu'une fraction de leurs plantations sera saisie ou détruite par mégarde durant l'ensilage.

Nouveau terreau fertile

Outre le Centre-du-Québec et la Montérégie, l'UPA remarque que les plantations sont de plus en plus nombreuses dans les Laurentides. «Le contrat social est un moyen efficace de réduire le fléau, mais ça prend aussi une mobilisation des producteurs», affirme Marie-Claude Thibault, directrice adjointe de l'UPA de cette région.

La collaboration policière avec les corps municipaux est cruciale, ajoute-t-elle, puisque plusieurs terres agricoles chevauchent plus d'une municipalité.