Les étudiants en droit de l'UQAM sont au coeur d'une véritable guerre sur l'avenir de leur trimestre. Ils ont massivement voté pour un retour en classe, mais les étudiants en science politique, membres de la même association, estiment qu'ils n'ont pas la légitimité de prendre cette décision. Depuis lundi, des escouades font la tournée des classes armées de flûtes et de trompettes pour empêcher que les cours aient lieu.

«Je suis extrêmement déçue de la tournure des événements», rage Geneviève Ruel, étudiante en droit, qui a voté pour la reprise des classes.

Nous l'avons croisée jeudi matin au moment où une dizaine d'étudiants de science politique, portant leurs carrés rouges, venaient de faire la tournée des locaux où avaient lieu les cours afin de les évacuer.

«C'est très dommage que le mouvement s'entredéchire au lieu de se concentrer sur la lutte, a dit la jeune femme, appuyée contre le mur devant la salle vide. Nous avons tous le même but, mais à cause d'impératifs académiques, nous devons retourner à l'école.»

Après 11 semaines de grève, les quelque 600 étudiants de droit au premier cycle commencent à s'inquiéter pour leur avenir. Plusieurs craignent de ne pas pouvoir entrer au Barreau ou au notariat en août prochain. Ils se sont réunis en association modulaire (seulement les étudiants de droit) le 23 avril et ont voté par une majorité claire pour la fin de la grève dès le 7 mai. Selon une porte-parole de l'UQAM, un seul cours sur plusieurs dizaines a pu avoir lieu.

Deux associations en une

La situation est complexe à la faculté de science politique et de droit de l'université. Si les deux groupes d'étudiants ont chacun une association modulaire, ils sont aussi affiliés à une même association facultaire, l'Association facultaire étudiante de science politique et droit (AFESPED), très militante, où ont eu lieu les votes de grève depuis le début du conflit. C'est entre autres parce qu'ils y sont minoritaires que les étudiants en droit se sont réunis de leur côté à la fin du mois d'avril pour mettre fin à la grève.

Le 8 mai, lors d'une assemblée de l'AFESPED qualifiée «d'assez intense» par les comités directeurs des deux regroupements, une motion demandant que la décision de l'Association des étudiants en droit (AED) soit reconnue a été rejetée à 63%. Depuis, les cours sont systématiquement perturbés.

«On demande aux gens de sortir et, s'ils ne veulent pas, on s'assure que les conditions d'enseignement ne sont pas réunies en jouant de la trompette ou en scandant des slogans, explique Mathieu Cousineau-Degarie, exécutant à l'AFESPED. Des fois, ça va très vite, d'autres, il faut insister un peu.»

La grogne monte

Afin de s'assurer que les levées de cours se font dans le calme, l'UQAM envoie des médiateurs dans chaque cours de droit pour «faciliter la discussion». Comme a pu le constater La Presse jeudi, des agents de sécurité ne sont jamais bien loin.

Mais la grogne monte au sein du corps étudiant. «Le climat est tendu, admet une porte-parole de l'AED, Julianne Marinier. Ce n'est pas une situation facile. Jusqu'à maintenant, ça se déroule relativement bien, mais il y a de la frustration. C'est évident. On a donné 11 semaines au mouvement de grève. Ce n'est pas comme si on n'avait rien fait.»

Étonnamment, l'AED est contre l'idée de se tourner vers les tribunaux, comme plusieurs autres l'ont fait depuis les dernières semaines. «Ça ne fera qu'exacerber les tensions», croit Mme Marinier.

Des étudiants prévoient toutefois déposer des injonctions à titre individuel. L'UQAM a pour sa part convoqué l'AFESPED au palais de justice hier pour demander une ordonnance de sauvegarde. La cause a été reportée à mardi.