Les trois amis de Radio Radio ralentissent le rythme avec leur troisième album Havre de Grâce, fait avec des amis entre un chalet de la Louisiane et le bord d'un lac en Nouvelle-Écosse. C'est un album plus introspectif et varié dans les styles, mais Arthur Comeau, Gabriel Malenfant et Jacques Doucet assurent que ce sera autant le party sur scène. Entretien philosophique avec le trio acadien électro-rap chiac dans une maison de thé du Vieux-Montréal.

Arthur Comeau, Gabriel Louis Bernard Malenfant et Jacques Alphonse Doucet nous donnent rendez-vous dans une maison de thé du Vieux-Montréal. L'endroit est calme, zen. Derrière notre table, une chute d'eau coule au son d'une musique chinoise.

C'est justement le sentiment que nous avons éprouvé en écoutant Havre de Grâce. Comme si les membres du trio électro-rap acadien avaient décidé de s'arrêter pour faire le point.

Plus instropectif et groundé votre disque, les gars?

«Des chaleurs, des studios et des amis», résume Jacques.

Radio Radio a enregistré du matériel à Montréal, mais surtout dans un chalet en Louisiane baptisé Floating Light, de même que dans un «camp» au bord d'un lac en Nouvelle-Écosse.

«Rien n'était planifié» pour la préparation du troisième album, indique Radio Radio.

«Nous sommes allés au festival international de Louisiane à Lafayette l'an dernier et nous sommes tombés amoureux de la place, raconte Gabriel. En étant acadiens, il y a un lien d'appartenance qui existe... un lien familial de générations. Ce sont des music lovers tout court et il y a des partys enflammés... donc pour nous, la Louisiane est un perfect match.»

«En plus, les gens nous comprennent quand on parle là-bas!», ajoute Jacques.

Un an a séparé les séances d'enregistrement entre la Louisiane et la Nouvelle-Écosse, alors le son de Havre de Grâce a évolué. «Un album, tu ne peux pas le planifier. C'est comme quand t'abordes une fille. Tu plonges», illustre Gabriel.

Cela explique pourquoi Radio Radio affirme que c'est son album le plus «éclectique» (sonorités country, cajun et acid jazz) avec un «son plus vaste».

«C'est peut-être moins trashy que des chansons comme Jacuzzi et Kenny G-Non Stop, mais c'est toujours la fête», signale Arthur.

Havre de grâce comprend même trois chansons de lovers, dont Chambralit, où les gars chantent avec leur chiac unique: C'est la Big Dipper vico sipper/Veux-tu voir le Milky Way/Good To The Last Drop/Worry-pas du life struck.

Plusieurs invités

Les gars de Radio Radio ont beaucoup tourné avec les chansons de Belmundo Regal, ici comme ailleurs en Europe, au Mexique et aux États-Unis. Avec Havre de Grâce, ils ont voulu faire état des rencontres qu'ils ont chéries au fil du temps.

Poncho French figure sur deux pièces. «Poncho French a deux vitesses: over drive et super vite. Il a un volume et c'est olé super fort. Il a tellement d'énergie. Il est high on life», dit Jacques.

La poète acadienne Georgette Leblanc, lauréate du prix Félix-Leclerc, entre en selle sur le premier extrait, Galope. Il y a également des intrumentations de Julien Sagot, Stéphane Bergeron, Éloi Berthelet et de l'accordéoniste Horace Trahan, qui ajoute une touche unique à la chanson Y'en a qui connais.

Mamoru Kobayakawa a également joué de la basse sur quelques pièces par hasard, lui qui devait tourner un film avec des «grosses têtes en papier mâché comme dans le clip de Lisa LeBlanc», indique Jacques.

En entrevue, Arthur Comeau, Gabriel Louis Bernard Malenfant et Jacques Alphonse Doucet sont connus pour jouer les comiques, mais ils sont également capables de paroles philosophiques et sages: «Laisser les choses se placer d'elles-mêmes», «les faire pour des bonnes raisons» et la «métaphysique» de la musique.

C'est ça, le Havre de Grâce?

«Poncho vient du Maryland. On conduisait ensemble des États-Unis pour le show du 16 décembre et on a vu une ville appelée Havre de Grâce», raconte Arthur.

«Le mot te force à ralentir, poursuit-il. Si t'es on the run, c'est un sentiment d'accueil et de chaleur.»

«C'est un état, une place où t'as la paix... où tu reviens à la source», renchérit Gabriel.

Et Arthur de conclure: «Quand tu voyages beaucoup, t'as pas besoin d'une maison, mais t'as besoin d'un chez-vous. Et si tu peux le créer dans un son...»