Pendant que le maire de Saint-Jérôme faisait transformer sa maison par la firme L'Archevêque&Rivest, la Ville donnait le feu vert à la même entreprise pour construire un aréna de plusieurs millions de dollars.

Hier, en conférence de presse, Marc Gascon s'est défendu d'avoir manqué à l'éthique en confiant la restauration de son bungalow à L'Archevêque&Rivest au printemps 2008. Cet entrepreneur spécialisé dans le secteur non résidentiel a obtenu d'importants contrats de la Ville de Saint-Jérôme au cours des dernières années, comme l'a révélé La Presse mercredi.

Pour sa défense, le maire a soutenu que L'Archevêque&Rivest n'avait plus de liens contractuels avec la Ville depuis juillet 2007 et que, en conséquence, le choix de cette firme à ses fins personnelles ne posait aucun problème éthique.

Or, selon nos renseignements, les employés de L'Archevêque&Rivest travaillaient toujours à la maison de M. Gascon lorsque la Ville a accordé un bail de 49 millions de dollars sur 25 ans aux promoteurs de l'aréna, en juin 2009. Le projet de construction et d'exploitation de l'aréna était proposé par Construction Généphi, en partenariat avec L'Archevêque&Rivest. Il a finalement été bloqué par le ministère des Affaires municipales et abandonné par le promoteur.

200 000$ de travaux

Hier, en réponse aux journalistes, le maire a dit qu'il avait demandé à une seule entreprise - L'Archevêque&Rivest - de lui présenter un projet pour sa maison. Marc Gascon affirme qu'il a tout payé à l'entrepreneur, soit plus de 200 000$, mais il n'a pas exhibé son contrat et ses factures. Nous avons demandé ces factures, mais elles ne nous avaient pas été transmises au moment de mettre sous presse.

«Il y a des limites à venir jouer dans la cour privée des personnes publiques et à laisser planer des insinuations de conflits d'intérêts», a dit le maire.

L'Archevêque&Rivest est spécialisé dans les secteurs commercial, industriel et institutionnel.

L'un de ses dirigeants, Sylvain Rivest, a reconnu faire peu de travaux pour des particuliers: «On fait des maisons seulement pour les clients qu'on connaît et dont on sait qu'ils vont nous payer. On n'ouvre pas le résidentiel pour tout le monde.»

Au cours de sa conférence de presse, le maire Gascon a indiqué qu'il tenait à favoriser des entreprises locales pour faire ses travaux. L'Archevêque&Rivest, l'entrepreneur général, dispose bien d'une antenne officielle à Saint-Jérôme, mais aucun employé de la firme n'y travaille, comme La Presse a pu le constater. Et lorsqu'on compose le numéro de téléphone associé à cette adresse, un message renvoie les interlocuteurs vers le siège social, à Repentigny.

Le maire de Saint-Jérôme est aussi président de l'Union des municipalités du Québec. À ce titre, il a demandé au gouvernement Charest de nommer un commissaire à l'éthique afin de guider les élus municipaux avant que des problèmes ne surgissent.

Marc Gascon ne voit pas de problème éthique dans la proximité entre ses affaires personnelles et les affaires publiques.

Par contre, l'entrepreneur Sylvain Rivest considère avec le recul que cela n'est pas une très bonne idée. «Avec tout ce qui se passe dans le monde municipal aujourd'hui, peut-être que l'on dirait non, mais, dans le temps, je ne voyais aucun risque ou problème», nous a-t-il dit plus tôt cette semaine.

Par ailleurs, le maire a tenu à souligner que c'est à sa demande que le ministère des Affaires municipales a entrepris une «vérification» - et non une enquête - sur le processus administratif de la Ville, compte tenu des «rumeurs d'irrégularités».

«Nous n'avons rien à cacher. Et à ceux qui me demandent de me retirer de mes fonctions, c'est non», dit-il.

Contre une enquête sur la construction

Tout comme le gouvernement Charest et la FTQ, l'Union des municipalités s'oppose à une enquête sur l'industrie de la construction et ses liens avec le crime organisé.

«Le vrai message de l'Union des municipalités, c'est: pas nécessairement une enquête publique, mais une enquête si nécessaire. Notre option a été de dire: regardons ce que le gouvernement est en train de mettre en place et si ça porte ses fruits et, sinon, nous serons d'accord avec une enquête publique», a dit Marc Gascon.