Ça fait maintenant 50 ans qu'Astérix, Obélix et leurs complices résistent à l'envahisseur romain. L'anniversaire n'est pas passé inaperçu : les Gaulois ont été salués partout autour du globe, y compris sur la Toile, où Google s'est permis un clin d'oeil. Comme un tel événement doit s'accompagner d'un album, Albert Uderzo en a profité pour lancer L'anniversaire d'Astérix et Obélix.

Du haut de ses cinq décennies, le petit héros ne semble pas prendre une ride. Néanmoins, l'usure du temps se fait sentir. Déjà, avec Le ciel lui tombe sur la tête, Uderzo semblait à bout de souffle et d'idées. Ce 34e ouvrage n'arrange pas les choses. Présenté comme s'il s'agissait d'une aventure, où Astérix et Obélix sont célébrés par leurs pairs, cet album est en fait un collage peu inspiré de courtes histoires, mi-inédites, mi-rares, dont une sur un texte de feu René Goscinny. On sourit parfois, mais on soupire surtout d'ennui devant cette parution obligée.

Pas de mousse dans Les Nombrils

En tournant les premières pages de ce quatrième tome des Nombrils, on a d'abord l'impression que Delaf et Dubuc font du surplace. Les gags sont efficaces, mais tournent sensiblement autour des mêmes thèmes : les ennuis amoureux des ados et leur lutte pour se faire accepter. Puis, environ au tiers de l'album, les deux Estriens nous raccrochent à leur univers grâce à des trouvailles sur le plan du scénario et de l'approche narrative. Ils exploitent avec brio la nouvelle dynamique qui oppose les chipies Jenny et Vicky, ainsi que la grande échalote Karine à Mélanie, la manipulatrice. Par ailleurs, l'univers de Karine s'apprête à basculer avec l'arrivée d'un personnage qu'on croyait être un simple figurant. Quant à la finale, elle vaut à elle seule le détour.

Suspense onirique

Frédérick Peeters nous plonge dans une fascinante histoire avec Pachyderme. Une femme, prise dans un embouteillage, décide d'abandonner sa voiture pour aller rejoindre son mari, qui est dans un état critique à l'hôpital. Son parcours sera interminable et peuplé d'étrangeté : un personnel hospitalier inquiétant, un enquêteur qui se faufile dans la tuyauterie des lieux, un médecin qui n'en serait pas vraiment un... Cette fiction, qui n'est pas sans évoquer David Lynch, est délicieusement déstabilisante. Dessiné avec aplomb dans une facture réaliste, servi avec des couleurs en adéquation avec le caractère baroque du scénario, Pachyderme est à la fois un thriller, un récit d'espionnage et un drame psychologique.

Maux de mer

Décidément, la mer inspire Chabouté. Après Tout seul, qui relatait le quotidien d'un individu ayant grandi dans un phare, il met le cap vers Terre-Neuve, au début du siècle dernier. Une équipe de marins part pour une longue expédition à la conquête de poissons. L'aventure tourne au drame lorsque des individus sont assassinés mystérieusement. Fidèle à lui-même, l'auteur opte pour un noir et blanc parfaitement maîtrisé. Il traduit sans mal le rythme de la houle et la situation intenable de ce huis clos. Malheureusement, la chute un peu prévisible n'est pas aussi réussie que la montée dramatique qu'il bâtit.

L'aventure du quotidien

Rabaté, à qui l'on doit notamment Hibicus, propose avec Le petit rien tout neuf avec un ventre jaune l'histoire d'amour de deux losers. Lui est proprio d'un magasin de farces et attrapes («je suis une vraie merde qui vend de fausses merdes en plastique!»); elle est acrobate dans un cirque itinérant qui ne roule pas sur l'or. L'espace de quelque temps, leur quotidien s'illuminera. Un album en demi-teintes, où le rire se confond avec les larmes.

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* Goscinny et Uderzo. L'anniversaire d'Astérix et Obélix, Albert René, 56 p.

**** Delaf et Dubuc. Les nombrils : 4, Duel de belles, 46 p.

**** Frédérick Peeters. Pachyderme, Gallimard, 90 p.

*** Chabouté.Terre-Neuvas, Vent d'ouest, 122 p.

*** Rabaté. Le petit rien tout neuf avec un ventre jaune, 102 p.