Il est «inconcevable» que les responsables du Musée d'art moderne de Paris, théâtre d'un vol spectaculaire dans la nuit de mercredi dernier, aient signalé à tous les employés que le système d'alarme du musée était inopérant, estime Alain Lacoursière, expert québécois en matière de crimes de cette nature. De plus, déplore-t-il, les autorités françaises semblent bien mal mesurer l'intérêt du crime organisé pour de telles oeuvres.

Cinq tableaux d'une valeur totale de 225 millions ont été dérobés au Musée d'art moderne de Paris, le plus facilement du monde puisque le système d'alarme était désactivé depuis deux mois pour réparations. «Les autorités du musée avaient envoyé une note aux employés pour leur dire d'être vigilants à cause de l'arrêt du système d'alarme. Ça n'a aucun sens! Aussi bien envoyer une note pour dire: nos portes sont ouvertes!» dit M. Lacoursière.

 

L'ex-sergent du SPVM, qui a monté une escouade spécialisée sur le vol d'oeuvres d'art, est désormais à la retraite. Il n'en revient pas de voir les autorités françaises se perdre en conjectures sur les intentions des voleurs. «Ces toiles ne pourront jamais être vendues. Il n'y a pas de marché», a notamment déclaré Pierre Cornette de Saint-Cyr, directeur d'un autre musée parisien.

«Les Français pensent que c'est un collectionneur qui a fait faire le coup. C'est une idée du siècle dernier. Ils ne comprennent pas du tout l'intérêt du crime organisé pour ce genre d'oeuvres», dit Alain Lacoursière. Selon lui, le scénario est clair: les voleurs vendront les toiles pour une fraction de leur prix à des chefs de la mafia italienne ou russe, ou à des barons colombiens de la drogue.

Il y a 20 ans, le Musée d'art de Boston avait été l'objet d'un vol tout aussi audacieux. Treize tableaux d'une valeur totale de 300 millions avaient disparu. «Les voleurs avaient des uniformes de policiers et une fausse voiture de police. Ils avaient longuement préparé leur coup. On ne passe pas des mois à planifier un coup comme ça pour voler des tableaux invendables», fait valoir M. Lacoursière.

Les tableaux de Boston n'ont jamais été retrouvés. Ils sont probablement, pense Alain Lacoursière, dans les luxueuses résidences de chefs du crime organisé. «Quand on arrive chez Mom Boucher et qu'il y a trois oeuvres volées sur le mur, personne n'appelle la police. C'est une fierté pour ces gars-là d'avoir des oeuvres volées chez eux. En plus, ce sont des oeuvres qu'ils ont payées une bouchée de pain», dit l'ex-policier.