Il y a une semaine, Wildano Félix était reçu à la table familiale de l'un des jeunes qu'il entraîne au basketball depuis l'âge de 11 ans. Le jeune en a aujourd'hui 19 et s'apprête à partir pour l'Université de la Caroline du Sud, où il jouera dans l'équipe universitaire grâce à une bourse de 50 000$. Vendredi dernier, c'était son souper de départ. Et l'entraîneur de 33 ans, l'équivalent d'un grand frère pour le jeune et des centaines d'autres du quartier St-Michel, a savouré cet instant comme un grand cru.

Il y a cinq ans, Wildano Félix a rejoint une bande d'amis d'enfance, tous issus de St-Michel, qui avaient fondé une équipe de basket au nom symboliquement chargé : les Monarques. Les rois du basket, les rois de St-Michel. Un message positif dans la mer de messages négatifs que recevaient les jeunes issus du quartier, où les gangs de rues sont toujours très actifs.

«Mes amis et moi, on a grandi dans ce quartier. On a vu la réalité. Et on s'en est tous bien sortis. C'est le message qu'on veut leur lancer : ce n'est pas parce que vous venez de St-Michel que vous ne pouvez pas avoir de diplôme et réussir. Ce n'est pas un quartier facile, mais on va chercher les jeunes et on les garde pendant des années.»

Cinq ans plus tard, les Monarques ne sont plus une simple équipe de basket. C'est devenu un organisme communautaire majeur, qui offre des activités sportives et de loisirs à plus de 1000 jeunes par an. Les Monarques sont actifs dans toutes les écoles primaires du quartier et à la polyvalente Louis-Joseph Papineau. Basketball, hockey-cosom, athlétisme, volleyball, fêtes de quartier, spectacles de musique : les Monarques sont partout.

«Les Monarques, c'est notre gang à nous, positive, où il n'y a pas de couleurs, sauf celle de l'uniforme : orange», dit-il en riant.

Parce qu'il leur a permis de pratiquer un sport, Wildano Félix a sauvé bien des jeunes du décrochage et de la délinquance. «J'ai des jeunes qui n'étaient pas très forts à l'école. Ils étaient en difficulté d'apprentissage. Ils ne voulaient rien savoir de l'école. Et là, ils complètent leur cégep, ils sont à l'université. Même moi, je n'en reviens pas», dit-il.

L'entraîneur suit ses troupes de près, leur impose une discipline qu'ils n'ont parfois jamais connue. Il n'hésite pas à partir à la recherche d'un jeune dans les rues de St-Michel s'il n'est pas rentré chez lui après l'entraînement.

Néanmoins, certains anciens Monarques ont mal tourné. «Chaque fois qu'un de nos jeunes se fait arrêter, on a l'impression que tout s'écroule. On se demande, mais qu'est-ce qu'on a fait de pas correct avec lui? Mais j'en ai qui ont été derrière les barreaux et qui, maintenant, viennent dire aux jeunes à quel point c'était difficile.»