Le ministère public a requis six ans d'emprisonnement à l'endroit de l'as vendeur de pot du clan Di Maulo, Giuseppe Mancini. «C'est la plus importante organisation de production de marijuana jamais démantelée au Québec», a rappelé Me Éric de Champlain, lors des représentations sur sentence. Le gang en écoulait 250 livres par semaine, pour un chiffre d'affaires de 18 million$ par année. Une bonne partie de la drogue était envoyée aux États-Unis, via la réserve amérindienne d'Akwesasne.

«Sans Mancini, il n'y aurait pas eu d'exportation », d'insister Me de Champlain, en rappelant à la juge Louise Villemure, de la Cour du Québec, le fléau sans cesse grandissant de la culture et de l'exportation de marihuana aux États-Unis. «La situation au Québec est devenue incontrôlable, on ne peut plus permettre aux organisations criminelles de s'enrichir sans risque», a-t-il dit vendredi, en citant de sévères jugements déjà rendus à l'encontre d'autres trafiquants de l'envergure de Mancini.

De son côté, l'avocat de Mancini estime qu'une peine de deux à trois ans de pénitencier serait amplement suffisante, compte tenu des sentences de 54 mois imposées l'an passé aux deux principaux chefs de file de l'organisation, Anthony Di Maulo et Giuseppe Cossentino (ce dernier est déjà en liberté conditionnelle). La belle-mère de Di Maulo, Thi Mi Nguyen, qui approvisionnait le clan en marihuana, s'est en tiré avec trois ans. Ils avaient tous les trois reconnu leur culpabilité avant le procès. « Il est difficile de croire que M. Mancini soit puni plus sévèrement », a fait valoir Me Alexandre Bergevin.

Selon lui, l'avocat de la poursuite exagère l'importance de son client au sein du réseau, ainsi que l'ampleur du trafic qu'on lui impute. «En réalité, on a la preuve d'un trafic de 300 à 400 livres, et une très, très faible quantité a été exportée», a-t-il fait valoir. De son point de vue, le «rôle stratégique» de son client s'apparente davantage à celui de Joe Vince Di Maulo, frère de l'autre, chargé de la garde et de l'emballage de la marihuana vendue par le gang. Ce dernier a récemment écopé de 24 mois de prison. Il sera bientôt admissible à une libération conditionnelle.

Exceptionnellement, la conjointe de l'accusée, Barbara Jacobs, a pris la barre pour vanter ses mérites. À en croire cette mère de famille monoparentale, Mancini est un travailleur acharné et il a toujours été un beau-père modèle pour son fils. La femme de 59 ans a profité de son passage devant le tribunal pour dire qu'elle n'avait aucun lien de parenté avec qui que ce soit dans la réserve amérindienne d'Akwesasne. C'est que l'un des suspects autochtones mentionnés durant le procès s'appelle Abraham Jacobs.

La juge Louise Villemure rendra la sentence de Mancini le 28 octobre prochain. Elle se prononcera également sur le sort de Huy Chung Vu, 36 ans, un des clients du tandem Anthony Di Maulo-Thi Mi Nguyen. Le ressortissant vietnamien a été reconnu coupable de complot et de trafic de quelque 300 livres de marihuana. Étant donné que Vu a été condamné pour trafic d'héroïne en 1994, la Couronne réclame trois ans d'emprisonnement, tandis que la défense a recommandé de 18 à 24 mois. Me Alexandre Bergevin estime même «envisageable» une peine avec sursis, puisque Vu a passé 39 jours en détention préventive. Il a déjà porté en appel sa condamnation dans la présente affaire.