Comme toujours lorsqu'il retourne dans sa province d'origine, la Nouvelle-Écosse, le docteur John Butt revient à Bayswater pour s'asseoir près du monument de granit portant les noms des 229 victimes de l'écrasement de l'avion de Swissair, le 2 septembre 1998.

Le Dr Butt, qui vit maintenant à Vancouver, est l'ex-médecin légiste en chef de la province. Il s'est retrouvé sous les feux des projecteurs après l'écrasement du vol 111 dans l'océan, près de Bayswater, il y a 10 ans.

Pendant de longs mois, le médecin légiste a dirigé l'équipe chargée de trier, de classer et d'identifier les parties de corps humains retirées de l'eau ou retrouvées sur les berges. Il y en avait 15 000 en tout, ce qui témoigne de la violence inimaginable de la collision avec l'eau.

A l'aide de dossiers dentaires, d'empreintes digitales, de rayons X et d'échantillons d'ADN, le Dr Butt et son équipe se sont efforcés d'identifier le plus grand nombre de victimes possibles. Ils ont conduit la plus importante analyse basée sur l'ADN jamais faite avant les attentats terroristes du 11 septembre 2001 aux États-Unis.

Les blessures infligées aux passagers ressemblaient d'ailleurs à celles des victimes du 11 septembre. La plupart ont été décapités, et l'amputation des pieds était fréquente.

Mais l'aspect le plus difficile de sa tâche a été d'affronter la douleur des familles. C'est à lui qu'on a demandé de rencontrer les proches des victimes à mesure qu'ils arrivaient à Halifax. Il a décidé d'être honnête, de leur dire qu'un seul corps avait été retrouvé intact à ce moment, et qu'il était peu probable qu'on en trouve d'autres.

La tristesse qu'il a vécue pendant cette période s'est peu à peu effacée avec le temps, pour être remplacée par un sentiment de fierté professionnelle devant la façon dont lui et d'autres ont réagi à cette tragédie.

Le Dr Butt se dit encore plus impressionné par la réaction des gens ordinaires qui ont accueilli les visiteurs en deuil chez eux, les ont nourris et réconfortés. C'est dans la nature des Néo-Ecossais d'être ainsi, croit-il.

Les familles de chacune des 229 victimes ont reçu un cercueil contenant des restes, qu'elles ont pu inhumer ou incinérer. Les restes qui n'ont pu être identifiés, de minuscules fragments de chair et d'os, ont plus tard été enterrés dans deux dizaines de tombes communales à Bayswater.