Un regroupement d'une trentaine de personnalités du domaine médical ont signé hier la «Déclaration de Montréal», un plaidoyer en faveur du maintien d'un système de santé public gratuit accessible pour tous les Québécois, peu importe l'épaisseur de leur portefeuille.

Ces médecins sont inquiets. Ils affirment que les gouvernements fédéral et provincial sont en train de glisser rapidement vers la privatisation des soins de santé au Québec depuis le jugement Chaoulli de la Cour suprême, la loi 33 et le rapport Castonguay.

«Le discours se fait de plus en plus insistant: il faudrait rapidement s'ouvrir à l'assurance privée pour les soins déjà couverts par le régime public et augmenter la prestation privée, sous peine de voir notre système de santé péricliter. Ceux qui disent le contraire sont maintenant qualifiés de rêveurs ou d'illuminés», a déploré hier le Dr Simon Turcotte, porte-parole des Médecins québécois pour le régime public.

Le Dr Turcotte affirme que les remèdes proposés pour corriger les problèmes du système actuel auront pour effet de les aggraver. «On ne verra pas une amélioration de l'accessibilité pour l'ensemble de la population, mais seulement pour les mieux nantis. Il y aura des effet négatifs sur l'efficience, les coûts, la qualité des soins et surtout sur l'équité.»

L'Australie l'aurait expérimenté à ses dépens. «Les temps d'attente ont augmenté à cause du déplacement vers le secteur privé des médecins et du personnel infirmier», a illustré le Dr Turcotte.

Selon Danielle Martin, présidente fondatrice du regroupement canadien Médecins pour l'accès à la santé, les cas de cancer colorectal mal diagnostiqués seraient en hausse chez les Torontois suivis dans des cliniques privées plutôt qu'en milieu hospitalier.

Aux États-Unis

«Aux États-Unis, les soins primaires ont été sacrifiés au profit des soins plus payants dans les hôpitaux privés à but lucratif, où les coûts d'administration sont beaucoup plus élevés qu'ailleurs», a-t-elle ajouté.

La Déclaration de Montréal a été rendue publique alors que s'ouvre ce matin l'assemblée annuelle de l'Association médiale canadienne, que les signataires accusent d'être trop favorable à l'ouverture au privé à but lucratif.

Selon le Dr Turcotte, l'AMC, ne laisse entendre que la voix des «médecins-entrepreneurs» qui travaillent dans des cliniques à but lucratif.

En entrevue à La Presse, le président de l'AMC, Brian Day, a qualifié d'alarmistes les propos de la coalition. «La question n'est plus de savoir si le financement est public ou privé. Au Canada, nous dépensons beaucoup plus que dans les autres pays de l'OCDE et avons encore des listes d'attente beaucoup trop longues. Il faut explorer de nouvelles avenues», a-t-il relevé.

Le chef des urgences à l'Institut de cardiologie de Montréal, Alain Vadeboncoeur, le doyen de la faculté de médecine de l'Université de Sherbrooke, Réjean Hébert, le président de Médecins du Monde-Canada, Nicolas Bergeron, et le vice-président des pédiatres du Québec, Pierre Poulin, ont notamment signé la déclaration.