La mort tragique de Rémi Bourgoin, un homme de Shipshaw, qui s'est enlevé la vie le 25 juin dernier pousse sa famille à mettre en garde la population sur les effets secondaires associés à la prise du médicament Champix prescrit par les médecins pour aider à cesser de fumer.

"C'est quand même contradictoire. Une personne décide de cesser de fumer pour espérer vivre plus longtemps et elle s'enlève la vie. Cet événement a été un choc pour notre famille et nous avions des difficultés à comprendre pourquoi Rémi avait posé un tel geste", raconte Agathe Bourgoin, qui avait fait parvenir au journal, au nom de ses frères et soeurs, une lettre racontant cet événement malheureux.

Au lendemain du drame, les frères et soeurs ont tenté de trouver une explication à ce geste. Le fait que M. Bourgoin ait mis en branle un projet de construction de résidence dans sa région natale constitue un élément supplémentaire qui a poussé les Bourgoin à tenter d'expliquer le geste.

"Rémi avait vécu un certain nombre d'épreuves au cours des derniers mois, dont la mort d'un frère et d'un filleul dont il était très proche. Mais Rémi était un homme courageux et aurait normalement puisé l'énergie nécessaire à l'intérieur de lui-même pour passer cette épreuves. Pour en avoir parlé avec lui avant, le suicide ne faisait pas partie de ses plans", affirme Mme Bourgoin.

C'est alors que les membres de la famille ont découvert que leur frère tentait de cesser de fumer et prenait un médicament produit par la compagnie pharmaceutique Pfizer. Une recherche rapide sur l'internet a permis de découvrir que le médicament Champix, qui a été dans un premier temps commercialisé en Europe, n'était pas sans risque et avait même été l'objet d'avis de Santé Canada sur les effets secondaires associés à la prise de ce produit. L'avis en question a été diffusé auprès des professionnels de la santé le 13 juin 2008, quelques jours seulement avant que Rémi Bourgoin ne pose le geste fatal.

"Par la présente, Pfizer Canada, en collaboration avec Santé Canada, désire communiquer aux professionnels de la santé des données d'innocuité importantes concernant Champix et des notifications spontanées relatives à l'apparition d'effets indésirables neuropsychiatriques graves incluant l'humeur dépressive, l'agitation, l'hostilité, le changement de comportement, les idées suicidaires, le suicide ainsi que l'aggravation des troubles psychiatriques préexistants", stipule l'avis publié sur le site de Santé Canada.

Il est également signalé que depuis la mise en marché de Champix au Canada en avril 2007, 226 cas d'effets indésirables neuropsychiatriques ont été signalés. Depuis le lancement du produit sur le marché, les médecins ont prescrit 708 534 ordonnances de Champix.

Le même avis recommande l'arrêt de la prise du Champix dès le moment ou le patient constate qu'il ressent des effets secondaires. Il doit de plus contacter le plus rapidement possible un professionnel de la santé. Le 24 juin, Rémi Bourgoin a contacté Info-suicide pour les informer de sa situation. Le lendemain, alors que l'organisme tentait de faire un suivi de l'appel, le monteur d'acier était passé aux actes.

Dans cette longue missive, les membres de la famille Bourgoin soulèvent des questions sur le travail du médecin. Ils ne portent pas d'accusation, mais se demandent si ce dernier était bien au fait des effets secondaires associés à la prise de ce médicament pour certaines personnes.

"A-t-il pris le temps (le médecin), d'évaluer notre frère dans sa globalité ou, pressé par le temps, s'est-il contenté de prescrire le premier médicament qui lui vient à l'esprit? Et d'une manière plus générale, pourquoi le corps médical continue-t-il de prescrire ce produit face à autant d'effets secondaires graves et documentés?"

Lors de l'entretien avec Le Quotidien, Agathe Bourgoin a repris sensiblement les mêmes idées que celles contenues dans la lettre. La famille est consciente que le fait de publier cette triste histoire ne ramènera pas Rémi Bourgoin à la vie. Ils veulent toutefois que la population soit informée sur les effets secondaires sérieux que peut entraîner la prise de ce médicament.

Il est aussi impossible, dans ce cas, d'attribuer à la prise du médicament le geste de Rémi Bourgoin. D'autre part, la famille n'a pas été en mesure d'informer les policiers, ainsi que le coroner, du fait que M. Bourgoin utilisait ce médicament pour cesser de fumer.