Un médecin qui travaille auprès des toxicomanes du seul centre d'injection supervisée en Amérique du Nord soutient que l'attaque du ministre fédéral de la Santé, Tony Clement, contre les médecins qui appuient ces centres est «répugnante».

Le docteur Gabor Mate a déclaré mardi qu'il était scandalisé d'apprendre que le ministre mettait en doute le sens de l'éthique des médecins qui permettent ou encouragent les patients à se piquer au centre Insite, à Vancouver. «De la part de quelqu'un qui se considère ministre de la Santé, c'est une déclaration très malsaine», a-t-il dit.

Il a reproché au ministre Clement de s'en prendre à la moralité d'êtres humains qui s'efforcent de travailler auprès de patients extrêmement difficiles.

La veille, devant un congrès de médecins, à Montréal, le ministre Clement s'était interrogé sur le centre controversé d'injection supervisée, et s'était demandé s'il était éthique que des professionnels de la santé appuient l'administration de drogues.

Le président de l'Association médicale canadienne, le docteur Brian Day, lui avait répliqué en déclarant que 79 pour cent de ses membres sont favorables aux centres d'injection supervisée, qui permettent à des toxicomanes de s'injecter leur drogue sous supervision médicale, parce qu'ils favorisent une approche de réduction des méfaits de la drogue.

Le Dr Mate, qui travaille à l'étage de la désintoxication à Insite, a déclaré avoir passé dix ans à tenter d'aider la population toxicomane et marginalisée du quartier défavorisé de Downtown Eastside, à Vancouver, et que les propos du ministre ne feraient que la stigmatiser encore davantage.

A l'étage dévolu à la désintoxication, les toxicomanes effectuent un sevrage pouvant durer deux semaines avant de passer au troisième étage, où ils peuvent habiter en attendant de trouver un logement ou une place dans un centre de réadaptation. Ils ne peuvent pas consommer de drogue à cet étage.

Une porte-parole du réseau de la région de Vancouver pour les toxicomanes, Ann Livingston, soutient qu'il n'y a pas assez de programmes de traitement des toxicomanes. Selon elle, l'approche d'Insite s'est avérée la meilleure pour réduire les méfaits de la toxicomanie, et elle a engendré une demande pour l'ouverture de piqueries supervisées à Montréal et à Victoria.