L'Institut Maurice-Lamontagne de Rimouski va analyser les éperlans retrouvés morts en bordure du Saguenay dans le secteur de Rivière-Éternité afin de déterminer si ce phénomène a un lien avec la mort de bélugas, marsouins et phoques dans le fleuve Saint-Laurent au cours des derniers jours.

La découverte de ces éperlans n'aurait visiblement pas eu autant d'importance n'eut été de la découverte de huit carcasses de bélugas en l'espace de seulement deux semaines dans le Saint-Laurent, en plus de celles de marsouins et de phoques gris.

Il s'agit d'un phénomène difficile à comprendre pour les spécialistes de l'institut qui devront analyser les animaux et poissons morts pour tenter de percer ce mystère. Le défi scientifique est d'autant plus difficile que pendant la même période, des marées rouges constituées d'algues rouges qui produisent des saxitoxines ont été rapportées sur le fleuve. Ces marées ne sont pas un phénomène nouveau, mais leur ampleur et surtout, leur longévité, dépassent les observations habituelles.

"Ces marées rouges se forment quand il y a beaucoup d'eau douce qui s'écoule dans le fleuve et qui réduit la salinité de l'eau en surface. Le phénomène ne dure généralement pas longtemps, mais on constate qu'il persiste, ce qui signifie que les toxines se nourrissent", précise Michel Gilbert, gestionnaire à l'institut de recherche.

Il n'y a toutefois pas eu de marée rouge dans le Saguenay puisque les couches de surface sont essentiellement constituées d'eau douce et ces toxines ne prolifèrent pas en eau douce. Il est toutefois possible que les éperlans retrouvés dans le secteur Rivière-Éternité aient été en contact avec des marées rouges avant de pénétrer dans le Saguenay et de remonter jusqu'à Rivière-Éternité.

Il est beaucoup trop tôt selon le gestionnaire de l'institut pour déterminer l'impact de ces marées rouges sur les activités de pêche hivernale sur le Saguenay. Pour le moment, Pêche et Océans Canada a surtout fait des mises en garde sur la consommation de coquillages dans les régions où les marées rouges ont été signalées. Les coquillages absorbent ces toxines et entrent par la suite dans la chaîne alimentaire des autres poissons et animaux comme les phoques.

Quant au poisson, reprend Michel Gilbert, les toxines se retrouvent dans le foie et les gens ne consomment habituellement pas cette partie.

Au cours des dernières heures, des informations ont circulé à l'effet que ces marées ont été provoquées par l'écoulement au sol dans les grandes cultures. Michel Gilbert soutient qu'il est beaucoup trop tôt pour faire un lien entre les produits utilisés en agriculture, les précipitations abondantes, la formation de marées rouges dans le Saint-Laurent et la mort des petites baleines blanches.

"Ça demanderait des vérifications très larges sur les épandages de produits par rapport à d'autres éléments. Nous ne pouvons non plus affirmer que la présence des produits agricoles est la cause de la présence plus longue des marées rouges. Ça demanderait des recherches majeures. Pour le montant, les chercheurs sont sur le terrain et tentent de comprendre ce qui se passe."

Michel Gilbert n'a pas utilisé les termes "crise" ou "catastrophe", mais il est évident que la situation actuelle préoccupe au plus haut point les scientifiques. Habituellement, le troupeau de bélugas du Saint-Laurent et du Saguenay perd 10 à 11 spécimens par année. Les huit carcasses échouées des baleines blanches en seulement deux semaines tend à démonter qu'il se passe des choses anormales dans leur habitat.