Une embuscade tendue hier matin par des talibans a coûté la vie à quatre travailleurs humanitaires, parmi lesquels une résidante d'Outremont, Jackie Kirk. La professeure de 40 ans laisse derrière elle son mari et ses collègues de l'Université McGill.

Une seconde Canadienne a été tuée: Shirley Case, 30 ans, originaire de Colombie-Britannique. Les autres victimes sont une employée américano-trinidadienne et un chauffeur afghan.

Hier vers 10h30, heure afghane, deux voitures de l'ONG américaine International Rescue Committee (IRC) sont tombées dans un guet-apens à une cinquantaine de kilomètres de Kaboul.

Les talibans n'ont laissé aucune chance aux quatre passagers, retrouvés sans vie dans leurs véhicules bien identifiés aux couleurs de l'IRC.

«Il y avait les traces d'environ 10 balles sur le véhicule, mais davantage encore sur les corps des victimes», a dit à l'AFP le chef de la police de la province Logar.

Consternation

À Montréal, les proches de Jackie Kirk ont appris la nouvelle avec consternation. «Elle était heureuse et pleine d'espoir et voulait améliorer la vie des enfants et des femmes dans le besoin», a déclaré son mari Andrew Kirk, les yeux rougis par les larmes.

Jackie Kirk travaillait pour IRC depuis 2004 en tant que conseillère technique en éducation. C'était une voyageuse endurcie, comme en témoignent les statuettes en ébène, tapis orientaux et autres objets rapportés à son domicile d'Outremont. «Elle passait son temps à défaire et à refaire son sac à dos», a raconté son mari. Mme Kirk avait notamment travaillé au Pakistan, au Soudan et au Rwanda. Après l'Afghanistan, elle devait partir en mission à la frontière entre la Syrie et l'Irak. «Ce n'était pas une casse-cou. Elle connaissait la situation en Afghanistan», a précisé son mari.

Originaire d'Angleterre, Mme Kirk avait complété son doctorat à l'Université McGill, où elle enseignait toujours. Sa collègue Marie McAndrew l'a décrite comme quelqu'un «qui croyait en ce qu'elle faisait» et qui était dotée d'«un grand sens de l'humour». Les professeurs ont indiqué dans un communiqué que «son énergie, sa gaieté, sa générosité et son esprit critique» allaient être beaucoup regrettés.

Pour sa part, le premier ministre Stephen Harper a dénoncé la «brutalité» des talibans. «Cette attaque pleine de lâcheté contre des humanitaires sans arme montre une fois de plus le caractère dépravé des talibans», a-t-il dit.

De Genève, le Haut-Commissaire de l'ONU aux réfugiés, Antonio Guterres, s'est dit «choqué et attristé».

Cette attaque porte à 19 le nombre de travailleurs humanitaires assassinés cette année en Afghanistan. Il y en avait eu 15 en 2007.

Les attaques se multiplient

«C'est une très mauvaise nouvelle mais cela n'est pas du tout surprenant», a indiqué Almas Bawar Zakhilwal, directeur de l'antenne canadienne du Senlis Council, un centre de recherche indépendant. Depuis quelques mois, les attaques se sont multipliées autour de Kaboul, avec comme point culminant l'attentat contre l'ambassade indienne, début juillet.

Toutefois, il estime que les ONG ne devraient pas se retirer. «L'impact serait pire: les gens n'auraient plus d'eau ni de nourriture et les talibans profiteraient de ce vide pour s'imposer auprès de la population.»

Cette analyse ne semble pas être partagée par IRC qui a annoncé hier qu'elle suspendait «pour une durée indéterminée» sa présence en Afghanistan.