La famille de Mohamed Anas Bennis, tué lors d'un affrontement avec deux policiers de Montréal en 2005, a reçu une bonne nouvelle, hier. Une nouvelle qui survient au moment où une autre famille, les Villanueva, se questionne sur la façon dont son fils, Fredy, est mort samedi lors d'une intervention policière.

Le commissaire à la déontologie policière qui avait blanchi les agents Jonathan Roy et Yannick Bernier dans l'affaire Bennis doit refaire ses devoirs. Dans sa décision rendue publique, hier, sur son site Internet, le Comité de déontologie policière infirme la décision du commissaire. L'avocat Richard W. Iuticone, chargé de cette révision, a ordonné au commissaire de poursuivre son enquête dans un délai de 30 jours.

Le matin du 1er décembre 2005, Mohamed Anas Bennis, un Canadien d'origine marocaine, a quitté la mosquée Côte-des-Neiges, située près de son domicile. En rentrant chez lui, il s'est trouvé mêlé à une bagarre avec les deux agents. L'agent Bernier a été poignardé au cou et il a été sérieusement blessé à la jambe droite. Selon le rapport d'autopsie, Bennis, armé d'un couteau de cuisine, a bondi sans motif apparent sur les policiers. Ces derniers ont fait feu en voulant se défendre. Le jeune homme a été touché par deux balles et est mort peu après à l'Hôpital général juif.

Sa famille reproche aux deux policiers de ne pas avoir maîtrisé Mohamed Anas Bennis par d'autres moyens que leur arme de service. Le commissaire s'était interrogé là-dessus, mais il avait tout de même blanchi les deux agents. Aujourd'hui, le Comité de déontologie policière ordonne au commissaire «d'enquêter plus profondément, entre autres, en obtenant l'opinion d'un expert en techniques d'utilisation de la force».

Dans sa demande de révision, la famille Bennis reprochait aussi au Service de police de la Ville de Québec, chargé de l'enquête en vertu d'une politique ministérielle, d'avoir fait un travail incomplet. Cette partie de la plainte n'a pas été retenue par le Comité.

«C'est bien que le commissaire soit obligé de poursuivre l'enquête, mais il reste que la déontologie policière n'est pas un système assez transparent. Les policiers ne sont pas tenus de participer à l'enquête du commissaire. Est-ce que cette révision n'est qu'un délai supplémentaire pour blanchir pour de bon les policiers?» se demande la soeur aînée de Mohamed, Najlaa Bennis.

Après avoir reçu le rapport d'enquête de la police de Québec, un procureur de la Couronne avait déjà décidé de ne pas poursuivre les policiers. Toutefois, le Bureau du coroner a tout de même décidé d'ouvrir une enquête. La famille fonde plus d'espoir sur cette enquête, qui débutera en septembre, que sur la poursuite de l'enquête du commissaire à la déontologie policière.

La famille Bennis compatit avec les Villanueva. «Ils devront s'armer de patience et ne pas lâcher s'ils veulent obtenir la vérité. Mon frère a été tué il y a trois ans et on n'a pas encore eu accès au rapport d'enquête de la police de Québec, seulement à ses conclusions. Quand on n'a pas accès à toute l'information, cela fait grandir en nous le sentiment qu'on nous cache quelque chose», a conclu la soeur aînée de Mohamed Anas Bennis.

La Fraternité (le syndicat des policiers) n'a pas commenté cette décision, hier, préférant prendre plus de temps pour l'analyser.