La Cour suprême du Canada entendra la cause de quatre ex-employés du magasin Wal-Mart de Jonquière qui estiment avoir été congédiés illégalement pour avoir tenté d'exercer leur droit à la syndicalisation prévu au Code du travail et à la Charte québécoise des droits et libertés de la personne.

En février 2008, un banc de trois juges de la Cour d'appel du Québec avait donné raison à la compagnie qui prétendait qu'elle avait fermé la succursale parce qu'elle n'était pas rentable, ce qui constituait une cause juste et suffisante de licenciement collectif et renversait le fardeau de preuve imposé par l'article 17 du Code du travail pendant l'exercice d'un droit prévu au code.

Wal-Mart avait annoncé la fermeture de son magasin le jour même de la nomination d'un arbitre pour désigner une convention collective de travail, ce qui constituait une première en Amérique du Nord à cette époque.

Le magasin était fermé quelques semaines plus tard, le 29 avril 2005, privant d'emploi 190 personnes. Le Syndicat des travailleurs unis de l'alimentation et du commerce, en grande campagne d'organisation au Québec à cette époque, a déposé 79 plaintes de congédiement illégal en vertu de l'article 15 du Code du travail interdisant le congédiement et les mesures de représailles pour l'exercice d'un droit prévu au Code du travail. Le président de la Commission des relations du travail, Pierre Flageole, a donné raison à quatre employés choisis comme cas-types par les Travailleurs unis de l'alimentation et du commerce (FTQ) et Wal-Mart. Cette décision a été maintenue à la Cour supérieure par la juge Marie-France Courville le 13 juillet 2006.

Wal-Mart s'est adressée à la Cour d'appel qui, sous la signature des juges Paul-Arthur Gendreau, Allan R. Hilton et Lise Côté, a invalidé la décision de la Cour supérieure et révisé la décision de la Commission des relations du travail avec dépends payables par le syndicat.

Le Cour d'appel avait estimé que la Cour supérieure aurait dû réviser une décision "manifestement déraisonnable" de la CRT qui avait déterminé que Wal-Mart n'avait pas réussi à démontrer que la fermeture n'avait pas été un stratagème pour se débarrasser du syndicat avant de rouvrir plus tard. La Cour d'appel a estimé que le commissaire a fait défaut de raisonnement en désignant l'ignorance du gérant du magasin quant à l'avenir du bâtiment de la rue René-Lévesque comme étant un facteur prépondérant des intentions véritables de l'employeur. Le commissaire en avait déduit que la présomption du syndicat concernant un stratagème pour se débarrasser de ses membres dans le but de rouvrir par la suite avait été établi à sa satisfaction.

Par ailleurs, un recours collectif tenté par un groupe d'employés pour obtenir compensation a été rejeté par la Cour supérieure.

Cour suprême

Il ne faut pas prévoir que la Cour suprême entendra les deux recours des TUAC-FTQ au cours des prochaines semaines. Selon le sommaire des causes, la décision de la Cour suprême d'entendre les parties en dernière instance devra être suivie d'un dossier rassemblant tous les arguments plaidés depuis le début sur deux points en particulier: la notion de présomption de la preuve et de l'étendue du fardeau de la preuve d'une autre cause "juste et suffisante" de fin d'emploi.

Advenant une victoire des employés, ces derniers ne seraient cependant pas au bout de leur peine et devraient s'adresser de nouveau à la CRT pour déterminer le quantum des indemnités.

Les TUAC pourraient aussi revenir devant la CRT pour forcer l'arbitre nommé en 2005 à définir les règles d'une première convention, même si aucun employé ne travaille pour l'entreprise.

Une telle convention serait une première au Canada.