Le chef du Parti libéral, Stéphane Dion, ne voit pas l'urgence de rencontrer le premier ministre Stephen Harper avant la tenue des élections partielles du 8 septembre afin de discuter de la justesse de poursuivre les travaux parlementaires cet automne ou de déclencher des élections générales.

M. Dion, qui était en Saskatchewan hier et qui sera à Montréal pour le reste de la semaine, rejette l'idée que le Parlement est devenu dysfonctionnel, comme l'affirme le premier ministre depuis quelques semaines.

M. Harper a affirmé qu'il n'écarte pas l'idée de déclencher des élections cet automne parce qu'il n'est pas convaincu que la session parlementaire qui doit reprendre le 15 septembre sera suffisamment fructueuse pour son gouvernement.

Des élections partielles sont prévues dans les circonscriptions de Saint-Lambert et Westmount–Ville-Marie, au Québec, et à Guelph, en Ontario, le 8 septembre. Une quatrième élection partielle doit avoir lieu le 22 septembre dans la circonscription ontarienne de Don Valley Ouest.

M. Harper compte prendre une décision quant au déclenchement des élections après avoir rencontré les chefs des trois partis de l'opposition aux Communes. Des proches collaborateurs du premier ministre ont affirmé que M. Harper pourrait déclencher des élections après la fête du Travail.

Le réseau CTV a rapporté dimanche soir que le premier ministre pourrait se rendre chez la gouverneure générale le vendredi 5 septembre, ce qui entraînerait un scrutin le mardi 14 octobre. (La gouverneure générale sera en Chine du 6 au 10 septembre pour assister notamment aux cérémonies d'ouverture des Jeux paralympiques.) Les élections ont normalement lieu un lundi, mais le 13 octobre est un jour férié (fête de l'Action de grâce).

Mais des conflits d'horaires rendent impossible la tenue de ces rencontres cette semaine et la semaine prochaine. M. Dion était à Saskatoon hier et sera à Montréal le reste de la semaine. M. Harper part aujourd'hui pour une visite de trois jours dans le Nord canadien et sera de retour à Ottawa vendredi. La semaine prochaine, M. Dion sera à Winnipeg du mardi au jeudi afin de rencontrer ses troupes dans le cadre du caucus libéral.

Résultat : Stephen Harper commence à montrer des signes d'irritation, notamment envers Stéphane Dion, qui, selon des stratèges conservateurs, fait tout pour éviter de rencontrer le premier ministre avant les élections partielles du 8 septembre.

Le bureau du premier ministre aurait même offert une conversation téléphonique au chef libéral, ce que le bureau de M. Dion aurait rejeté.

«À tous les égards, le chef de l'opposition a coupé toutes les communications avec le premier ministre pour trois semaines. C'est clairement un signe de non-coopération», a affirmé Dimitri Soudas, un proche collaborateur du premier ministre.

Une rencontre «en personne»

Chez les libéraux, on accuse les conservateurs de créer une crise artificielle afin de justifier la tenue d'élections générales. «On ne convoquera pas les Canadiens à des élections générales qui coûteront 400 millions de dollars au terme d'une conversation téléphonique ou l'envoi d'un message texte. Les défis auxquels sont confrontés les Canadiens sont trop importants pour cela», a affirmé Mark Dunn, proche collaborateur de Stéphane Dion.

«M. Dion croit profondément que lui et M. Harper doivent se rencontrer en personne avant la reprise des travaux parlementaires pour discuter de la session automnale. Nous avons des pourparlers avec le bureau du premier ministre pour fixer une telle rencontre avant le 15 septembre. Les faits ne démontrent pas que le Parlement ne fonctionne pas, contrairement à ce que prétendent les conservateurs. Les conservateurs ne veulent tout simplement pas que l'on fasse la lumière sur les scandales qui s'accumulent», a ajouté M. Dunn.

Sous le couvert de l'anonymat, un stratège libéral a indiqué à La Presse que les libéraux préfèrent retarder le plus possible le déclenchement des élections fédérales pour trois raisons.

D'abord, ils souhaitent profiter de la reprise des travaux parlementaires afin d'attaquer l'éthique des conservateurs, notamment au chapitre des dépenses électorales au dernier scrutin. Certaines de ces dépenses ont été jugées illégales par Élections Canada.

Ensuite, les libéraux veulent attaquer le bilan économique du gouvernement Harper et la Chambre des communes représente le forum idéal pour le faire. Enfin, un scrutin après les élections américaines du 4 novembre qui couronneraient le candidat démocrate Barack Obama pourrait avoir un effet de ce côté de la frontière et profiter aux libéraux.

Du côté du Bloc québécois, le chef Gilles Duceppe a fait savoir hier qu'il était prêt à rencontrer Stephen Harper les 5, 6 ou 7 septembre afin de discuter de la rentrée parlementaire. M. Duceppe a déjà indiqué que son parti déposera une motion de censure envers le gouvernement minoritaire conservateur à la première occasion aux Communes si M. Harper n'abandonne pas son «idéologie de droite». Une telle motion, si elle devait être adoptée, provoquerait la chute du gouvernement Harper et des élections générales.