TAVIS applique la tolérance zéro à l'égard des gangs. Or, plusieurs reprochent au projet-pilote de cibler des communautés entières.

Le sergent-détective Anil Anand, grand patron de TAVIS, balaie cette critique d'un revers de main. Les plaintes des citoyens n'ont pas augmenté, fait-il valoir. «On crée des liens avec les citoyens des quartiers défavorisés tout en étant durs avec les criminels de ces quartiers», dit ce policier, qui a déjà travaillé pour Interpol. Les policiers distribuent à chaque citoyen des cartes de visite qui décrivent le projet.

Dans un jugement rendu plus tôt cette année, une juge de la Cour de l'Ontario a apporté de l'eau au moulin des détracteurs de TAVIS. Le jugement conclut qu'un citoyen peut refuser d'interagir avec la police s'il n'a rien à se reprocher. Deux agents de TAVIS avaient arrêté un jeune Noir parce qu'il refusait de répondre à leurs questions. Dans leur témoignage devant la Cour, les policiers ont dit qu'ils voulaient lui expliquer le rôle de TAVIS à la suite de deux fusillades. Le jeune s'est toutefois énervé et ils ont été obligés de l'arrêter. «On doit éduquer la Cour pour qu'elle comprenne notre rôle», estime le sergent-détective Anand, déçu du jugement.

Dans les rangs de TAVIS, il y a des Sondhi, Asner, Rudzitis, Nasser. Beaucoup plus de minorités visibles qu'à la police de Montréal (16,9% dans tout le corps policier torontois comparativement à 5,6% à la police de Montréal en 2007). D'anciens joueurs de soccer professionnels, un dentiste, un ex-prêtre et une éducatrice en garderie font aussi partie de cette escouade.

Le chef de la police, William Blair, est très fier de cette stratégie policière. «Nous avons la responsabilité de faire de la répression, mais aussi de construire une relation de respect avec nos communautés», a-t-il dit à La Presse. Les meurtres sont en baisse de 20% (40 cette année contre 50 à pareille date l'an dernier). Les agressions sexuelles et les voies de fait sont aussi moins fréquentes. L'approche TAVIS permet à la police de mieux connaître les «bons gars» comme les «mauvais», conclut le chef.

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Les grandes lignes de la stratégie TAVIS

La stratégie d'intervention antiviolence de Toronto (TAVIS en anglais) a été créée après une fusillade survenue au lendemain de Noël 2005 au centre-ville de Toronto, dans laquelle une adolescente de 15 ans est morte, tuée par une balle perdue.

TAVIS fait partie d'une stratégie globale dans laquelle le gouvernement ontarien a investi 68 millions de dollars depuis 2005. Budget: 5 millions par an (budget total de la police de Toronto: 786 millions).

Quatre groupes de 18 policiers sont prêts à être déployés partout dans la ville, au gré des événements. TAVIS travaille main dans la main avec les escouades d'enquêtes spécialisées en bandes criminalisées, armes à feu et drogues. Au total, la police de Toronto compte 5510 policiers.

Au 31 janvier 2007, TAVIS avait procédé à plus de 10 000 arrestations et saisi 436 armes à feu.