Le premier ministre de France, François Fillon, s'est défendu hier d'avoir voulu s'immiscer dans le débat sur la question nationale en parlant du Québec comme d'un «pays». Il a tenté de minimiser l'impair qu'il a commis jeudi.

Cette déclaration était un «écart de langage», a-t-il reconnu au cours d'une conférence de presse en compagnie du premier ministre Jean Charest. Au lieu d'utiliser à quelques reprises l'expression «pays francophone» pour désigner le Québec, il aurait dû utiliser «une nation», a-t-il affirmé.

François Fillon ne croyait pas faire de vagues en qualifiant le Québec de «pays» car, a-t-il plaidé, ce mot a «plusieurs sens». Il a demandé à être jugé avec indulgence.

«Chez moi, un pays, c'est un endroit où il y a des paysans. Alors pardonnez-moi cet écart de langage. Je ne voulais naturellement pas porter atteinte à l'unité territoriale du Canada.»

Jeudi, peu de temps après son arrivée dans la Vieille Capitale, François Fillon a également évoqué le fameux «Vive le Québec libre!» lancé par le président Charles de Gaulle du haut du balcon de l'hôtel de ville de Montréal en 1967. Cette fois encore, le premier ministre n'a voulu «en aucun cas se mêler des affaires intérieures du Québec et du Canada» en rappelant cette déclaration retentissante.

«Il n'est pas anormal, lorsque l'on vient évoquer le 400e anniversaire de la fondation de Québec, que l'on évoque aussi un événement historique qui a eu comme effet en France de braquer les projecteurs sur la relation franco-québécoise. Et il a donné une impulsion, puisque c'est à partir de cette période que se sont construits tous les instruments de la relation franco-québécoise», a expliqué M. Fillon, un gaulliste.

Le président Nicolas Sarkozy souhaite «sortir» de la doctrine de «non-ingérence et non-indifférence» qui caractérise les relations de la France avec le Québec, a rappelé le premier ministre. «Nous voulons être les meilleurs amis des Canadiens, et nous voulons garder la relation particulière qui nous lie au Québec.»

Charest n'est pas froissé

Jean Charest dit ne pas avoir été froissé par les déclarations de M. Fillon jeudi. Il a tenté lui aussi de minimiser l'affaire. «Il faut se décoincer dans la relation» entre la France et le Québec, a-t-il dit, provoquant des éclats de rire parmi les délégations françaises et québécoises. Selon lui, si l'on souligne le 400e anniversaire de la fondation de la ville de Québec et la relation France-Québec, «on ne peut pas faire abstraction» du général de Gaulle et de sa visite «marquante».

La chef du Parti québécois, Pauline Marois, qui s'était réjouie jeudi des propos de François Fillon, n'a pas été dérangée par ses précisions. Interrogée alors qu'elle s'apprêtait à rencontrer M. Fillon, elle a dit ne pas s'attendre à ce que des dignitaires étrangers fassent la promotion de la souveraineté, «un projet qui nous appartient».

Le chef de l'ADQ, Mario Dumont, qui a lui aussi rencontré M. Fillon, déplore que l'on dissèque ainsi le discours d'un dignitaire étranger et qu'on lui donne parfois un sens qui ne correspond pas aux «intentions réelles».

Accord en vue

Au cours d'une réunion au Château Frontenac, François Fillon et Jean Charest se sont entendus pour conclure d'ici au mois d'octobre un accord sur la mobilité de la main-d'oeuvre et la reconnaissance mutuelle des qualifications professionnelles.