Après un accident mortel survenu l'année dernière à Rimouski, le Bureau du coroner du Québec recommande d'interdire l'utilisation de sièges pour passagers sur les véhicules tout-terrain de type quad. Gros problème: la vaste majorité des bolides en sont équipés, affirme la Fédération québécoise des clubs quads.

La recommandation du coroner Jean-François Dorval fait suite à un accident survenu le 1er septembre dernier, alors que quatre passagers - un adulte et trois enfants - accompagnaient le conducteur d'un ces véhicules lors d'une balade. Le tout-terrain ne comportait qu'un seul siège, mais un "coffre de luxe" installé à l'arrière faisait office de siège secondaire. En montant une pente près d'un ruisseau, le véhicule a basculé et le conducteur, Frédéric Leblanc, est mort en se fracassant le crâne contre une pierre. Les autres passagers s'en sont sortis indemnes.

En dépit des recommandations des constructeurs de VTT, beaucoup de ces coffres d'appoint sont installés par les concessionnaires. Ils ont la forme d'un siège et "sont conçus pour être utilisés comme siège d'appoint", affirme le directeur général de la Fédération québécoise des clubs quad, Danny Gagnon.

La Loi sur les véhicules hors route interdit pourtant leur utilisation comme siège d'appoint. "Mais 80 à 90% des VTT qui circulent sur les sentiers en sont équipés et nous défendons leur utilisation parce que la Sûreté du Québec les tolère depuis 10 ans", affirme M. Gagnon.

Dans son rapport, le coroner recommande maintenant à la Sûreté du Québec et au ministère des Transports l'application stricte de la loi à l'égard de ces sièges pour passagers. Il suggère aussi au ministère de demander aux fabricants de ces accessoires "de faire en sorte que la conception de ces coffres ne permette plus qu'ils soient utilisés comme siège d'appoint".

Conduite à modifier

Selon Boumédiène Falah, ingénieur et professeur au Département de mathématiques de l'Université du Québec à Rimouski, le fait de permettre à un passager de monter à bord des VTT modifie complètement leur comportement dynamique. "Plus on augmente la masse, plus le centre de gravité est haut. Il faut alors modifier sa façon de conduire en faisant des transferts de poids. Ça prend une formation de conducteur. Et le problème avec ces sièges, c'est qu'ils limitent les mouvements des conducteurs, surtout dans les pentes, où il faut se pencher en avant", explique-t-il.

En octobre, M. Falah doit livrer un rapport au ministère des Transports traitant de l'utilisation de ces sièges.

"Pour l'instant, les informations scientifiques ne nous permettent pas de conclure qu'ils sont sécuritaires, affirme Stéphanie Cashman-Pelletier, chef du service des politiques de sécurité au ministère des Transports. Mais ces dernières années, il n'y a pas eu de décès sur les sentiers (fédérés). Est-ce qu'il y a des conditions particulières qui permettraient de les utiliser sur les sentiers? C'est ce que nous tentons de savoir avec cette étude."

Sur les sentiers, les amateurs attendent avec fébrilité la publication du rapport du professeur Falah. "Je fais souvent des balades avec ma conjointe et mes enfants, que j'installe dans une petite carriole qui s'attache à l'arrière. Si on interdit l'installation de ces sièges, je vais être obligé d'acheter un deuxième quad. Ce sont des machines qui coûtent 8000$ et plus. Ce n'est pas évident", affirme Bobby St-Pierre, un utilisateur de Longueuil rencontré près d'une piste fédérée de St-Amable.