S'il est ardu d'arrêter le progrès, le gros bon sens, lui, peine parfois à émerger. Difficile toutefois de lui barrer la route éternellement. Un bon exemple nous est venu de Québec mardi dernier lorsque le ministre de l'Agriculture a annoncé qu'on pourra bientôt graisser, comme on dit au Royaume, nos rôties avec de la margarine jaune. Ben dis donc!

Le Québec va enfin cesser d'être la risée des autres provinces. Dans le Rest of Canada, aux États-Unis, en Europe, les consommateurs sont assez intelligents pour ne pas confondre margarine et beurre. Pas ici, si l'on en croit les producteurs laitiers. Depuis des lunes, ils s'opposent à ce que la margarine commercialisée au Québec ait la même couleur que leur beurre. Ils tiennent à protéger leur part de marché, en d'autres mots.

À qui donner le coup de pied au postérieur dans ce débat? À l'Union des producteurs agricoles, qui abuse de son influence? À nos élus de l'Assemblée nationale dont la colonne vertébrale semble faite de margarine? Tiens, allons-y pour deux bons élans!

Mais évitez de vous réjouir, mes amis. À quand remonte la dernière fois où vous avez vu de la margarine jaune? Dans mon cas, c'était l'automne dernier dans un restaurant au Vermont. Je n'ai pu y plonger mon couteau. Trop dégoûtant.

Voilà ce que donne 15, 20, 25 ans (on ne sait plus) de conditionnement psychologique! On en vient à confondre l'ivraie pour le grain. Vu de cette façon, on lève notre chapeau à l'UPA! Quel tour de force, quand même!

François Bugingo a résumé avec humour le ridicule de cette situation sur les ondes de la radio de Radio-Canada. L'animateur d'origine africaine dit avoir choisi d'immigrer au Québec en raison du débat sur la margarine. "S'ils en sont rendus à débattre de la couleur de la margarine, c'est qu'ils ont réglé tous leurs problèmes importants", a-t-il affirmé.

Voilà un autre argument en faveur de l'immigration: nos nouveaux compatriotes ont le recul nécessaire pour nous faire réaliser l'invraisemblance de certaines situations.