Le plus long conflit de travail à avoir jamais touché un quotidien francophone du Canada est terminé. Après 14 mois de lock-out, les 252 employés du Journal de Québec préparent leur rentrée au travail après avoir conclu une entente de principe avec leur employeur, Quebecor.

Suivant la recommandation de leur syndicat, 98% des travailleurs de la salle de rédaction, et 85% des employés de l'imprimerie se sont prononcés en faveur du pacte, hier. Le règlement était intervenu dans la nuit de mardi à hier.

La nouvelle convention collective, d'une durée de cinq ans, prévoit des augmentations de salaire de 2,5% par année pour les travailleurs. Mais leur semaine de travail passera de 32 à 37,5 heures, réparties sur quatre jours. Ce règlement ne s'applique qu'aux employés actuels. Car ceux qui seront embauchés à l'avenir travailleront cinq jours, à raison de 37,5 heures par semaine.

Les journalistes ont également accepté le travail dit «multiplateforme». C'est-à-dire qu'ils pourront rédiger des articles pour la version imprimée du Journal ou pour l'Internet, en plus de prendre des photos et filmer certains événements.

«On a obtenu des gains de productivité importants et la possibilité d'évoluer dans un univers médiatique qui fonctionne 24 heures par jour», a affirmé Luc Lavoie, porte-parole de Quebecor.

«On ne comprenait pas l'insistance de l'employeur de vouloir augmenter les heures de travail sans les compenser financièrement, a pour sa part indiqué le président du syndicat, Denis Bolduc. C'est le compromis qu'on a dû faire pour conserver la semaine de quatre jours.»

Ligne dure

Dès le départ, Quebecor avait adopté la ligne dure face aux travailleurs. Les syndiqués l'ont accusé d'avoir planifié le lock-out en embauchant une quinzaine de cadres avant la rupture des négociations. Encore la semaine dernière, la direction s'est dite déterminée s'attaquer aux «dépenses extravagantes qui découlent de conventions collectives conçues à une autre époque».

Voilà pourquoi plusieurs employés ont été estomaqués d'apprendre la ratification de l'entente. «Je ne vois pas la nécessité d'un si long conflit pour arriver à cela», a résumé le journaliste Michel Hébert.

Le retour au travail devrait avoir lieu au début du mois d'août. D'ici là, les syndiqués continueront de publier leur quotidien gratuit.

«MédiaMatinQuébec continuera d'opérer jusqu'à ce que l'encre soit sèche sur le contrat, a indiqué un employé sous couvert d'anonymat. Le niveau de confiance est au minimum.»

Parmi les enjeux qui seront discutés avant le retour au travail, l'épineuse question des journalistes et photographes de Canoë, Nomade et Keystone. Ces agences ont été embauchées pour alimenter le Journal de Québec pendant le conflit de travail, ce qui a entraîné une plainte à la Commission des relations de travail.

Luc Lavoie n'exclut pas la possibilité d'embaucher ces travailleurs une fois la convention collective signée.

«Les employés de Keystone et Nomade, je ne voudrais pas travailler avec eux, affirme Denis Bolduc. On a un protocole de retour à négocier et ça va être une de nos demandes. Ces gens ont fait notre travail pendant 14 mois. Ils sont responsables en partie de la longueur du conflit.»