Le soir du référendum du 20 juin 2004, l'option de la reconstitution de la ville de Masson-Angers était gagnante.

Le soir du référendum du 20 juin 2004, l'option de la reconstitution de la ville de Masson-Angers était gagnante.

Par la suite, le recomptage demandé par Maurice Bourbonnais, président du comité du non, organisateur libéral et pourvoyeur à la caisse électorale libérale, annulait le choix connu des électeurs : deux sur trois avaient pourtant voté oui pour la reconstitution de la ville de Masson-Angers.

Pour la première fois au Québec, le référendum exigeait une seconde majorité éclipsant la première, soit qu'au moins 35 % des personnes inscrites sur la liste électorale devaient avoir voté oui. Après le recomptage, cette deuxième majorité atteignait 34.8 %.

Donc, malgré que 53 % des électeurs se soient présentés aux urnes, malgré que deux sur trois aient voté oui, le 35 % non atteint décidait que le non l'emportait. Ainsi, la ville de Masson-Angers ne pourrait être reconstituée.

On peut donc affirmer qu'une minorité avait réussi à imposer son choix à la majorité. Comment qualifier cet exercice soit disant démocratique imposé par le gouvernement de Jean Charest ?

Dans la période précédant le référendum, nous avions constaté que la liste électorale fournie par le directeur général des élections du Québec (DGEQ) comptait beaucoup trop de noms de personnes déménagées, décédées ou n'ayant jamais demeuré à Masson-Angers. La liste électorale était gonflée, par conséquent le 35 % exigé était gonflé aussi et plus difficile à atteindre. On comprend que ces personnes déménagées ou décédées ne pourraient jamais venir voter. Il s'est avéré que ces fausses inscriptions ont influencé le résultat du référendum pour le rendre perdant.

Nous avions compris qu'il était très important de faire nettoyer la liste. Nos tentatives pour faire radier ces noms par la commission de révision donnèrent très peu de résultats étant donné les exigences déraisonnables de la commission et le manque d'information à notre disposition. Le 35 % demeura gonflé.

Après le référendum, en dernier recours, nous avons décidé de nous adresser à la cour supérieure du Québec pour obtenir justice et réparation.

À la première rencontre en cour, lorsque la juge Danielle Grenier a dit de nous à la partie adverse : "Êtes-vous en train de me dire que ces gens-là ne pourront pas obtenir justice ?", nous avons eu confiance en elle. Nous savons maintenant qu'à la loterie de la justice nous avions tiré le mauvais numéro.

Notre requête alléguait qu'aucun des avis du DGEQ ne mentionnait qu'une personne de la même section de vote pouvait demander une radiation comme le stipule l'article 129 de la Loi sur les élections et référendums. Nous l'avons appris par hasard réussissant à lire à l'envers une formule sur une table en retrait, derrière le personnel de la commission de révision, vers 14 h 30, la dernière journée de la révision, le 5 juin.

Nous avions à ce moment-là plus de 300 noms vérifiés à faire radier. Mais nous n'avions plus le temps pour le faire, la commission de révision se terminait. Si nous avions été bien informés et accueillis, nous aurions pu faire radier ces noms comme nous avons pu le faire sans entrave lors de l'élection municipale de novembre 2005.

Devant la cour nous avons prouvé que le DGEQ n'avait pas donné toute l'information pertinente dans les avis d'inscription, que nous avions les moyens de faire radier ces personnes non-habiles à voter en temps utile, que la liste électorale était gonflée, que le 35 % exigé était gonflé, que la commission de révision manquait de formation et nous faisait des exigences déraisonnables.

Les conclusions du jugement n'en retiennent rien. Absolution totale et inconditionnelle.

Au lieu de quoi, le jugement met de l'avant que nous, simples citoyens, aurions dû prendre un avocat et envoyer une mise en demeure à ce moment-là pour faire valoir nos droits auprès de la commission de révision et du responsable du scrutin. Que nous aurions dû connaître la partie de la loi qui ne nous avait pas été transmise par le DGEQ. Nous comprenons que nous aurions dû faire le travail que le DGEQ et la commission de révision avaient négligé de faire, que tout le fardeau de la révision de la liste électorale (13 % d'erreurs) reposait sur nos épaules, que nous aurions dû connaître la loi mieux que ceux qui étaient payés pour faire le travail.

Dans deux causes semblables, le juge Léger, pour la cause de l'Ile-Bizard (Cour supérieure, No. 500-17-021697-043), prend le parti des citoyens.

La juge Grenier, pour la cause de Masson-Angers (Cour supérieure, No. 550-17-001501-046), prend le parti du système.

Nous constatons aussi que nous avons connu tous les vices hautement décriés de notre système de justice : délais déraisonnables et facture énorme, pour avoir en finale l'impression de n'avoir obtenu ni justice, ni réparation.

Aller en appel prolongerait encore pendant des années ce processus, ce que nous refusons de faire.

Après huit ans à se battre contre un système dit démocratique qui a droit à l'erreur, à la médiocrité, à la nonchalance, à toutes sortes d'abus, on reste avec le sentiment de s'être fait voler notre ville de Masson-Angers à cause de la complicité de toutes les autorités concernées. C'est une gifle à la démocratie et à la crédibilité de la justice.

Nous avons réclamé sur toutes les tribunes, face à toutes les instances, le respect, simplement le respect du statut de la municipalité de Masson-Angers fondée en 1897, fruit de la vision de Georges-Alphonse Dugal, fruit du travail de nos pères, résultat d'une fusion en 1980 et promesse d'un avenir heureux et prospère pour nos enfants. Cela méritait le respect.

Luc Montreuil

Pour le Collectif pour la reconstitution de la Municipalité de Masson-Angers

14 juillet 2008