Persévérante, Nadia Bechraoui affirme avoir amassé assez d'argent en vendant des canettes et des bouteilles vides pour s'acheter un ensemble laveuse-sécheuse.

«Et c'est de la bonne qualité, affirme la dame de 65 ans, qui dit pratiquer cette activité depuis quelques années déjà. Ça m'a pris deux ans et demi pour y arriver.»

La Presse a rencontré Mme Bechraoui par un matin pluvieux de la semaine dernière, à l'entrée d'un supermarché Métro du quartier Rosemont. Habituée des lieux, elle est entrée avec son vieux sac bourré de contenants, qu'elle a déversés dans un chariot. Elle s'est mise en file, attendant son tour, échangeant quelques mots avec d'autres ramasseurs, près des gobe-contenants qui émettaient des éructations d'aluminium écrasé.

Combien coûte un ensemble laveuse-sécheuse? Un saut sur le site d'un grand magasin de meubles québécois indique des prix oscillant entre 700 et 1100$. Prenons un ensemble pas trop cher: 800$. Comme une canette de boisson gazeuse consignée rapporte cinq cents, il faut 16 000 contenants pour s'offrir un tel cadeau!

Algérienne d'origine, Mme Bechraoui est arrivée au Canada il y a une vingtaine d'années. À la retraite, elle vit maintenant d'une petite rente qu'elle arrondit grâce à la revente de contenants consignés.

Pour cette dame toute menue, ramasser des canettes constitue en fait le meilleur des trois mondes: économiser quelques dollars, faire de l'exercice et venir en aide aux personnes handicapées.

«Vous savez ce que c'est? demande-t-elle en montrant, dans le creux de sa main, quelques languettes d'aluminium. Je vais les porter à un organisme pour acheter des fauteuils roulants.»

Parfois, ses confrères de la rue lui donnent leurs languettes. «Ils savent que je les ramasse», précise-t-elle avec reconnaissance.

Pour elle, abolir la consigne constituerait un retour en arrière. «Les gens ne vont pas nécessairement mettre leurs contenants dans les bacs à recyclage. Ils les jettent bien souvent dans les sacs verts.»