Le premier ministre Stephen Harper ne bouge pas d'un iota. Malgré les bandes vidéo troublantes rendues publiques hier, il n'a pas du tout l'intention de revenir sur sa position en demandant au gouvernement américain le rapatriement de Guantánamo du jeune Omar Khadr.

Ces bandes vidéo ne changent donc en rien la résolution déjà affichée par le premier ministre au Japon la semaine dernière, lors du sommet du G8, de ne rien tenter pour rapatrier le citoyen canadien.

À Toyako, après avoir appris qu'Omar Khadr avait été victime de tortures à Guantánamo, le chef du gouvernement avait affirmé que «la situation restait la même», que M. Khadr était accusé de «choses sérieuses», qu'il y avait «un processus judiciaire aux États-Unis» et que le jeune accusé pouvait «présenter sa défense lors de son procès». «Nous pensons que ce processus doit continuer», ajoutait Stephen Harper.

Hier, le directeur des communications du premier ministre, Kory Teneycke, a repris exactement les mêmes propos tout en refusant de commenter le contenu des bandes vidéo.

Tous les partis de l'opposition ont demandé hier le rapatriement de M. Khadr, pour des raisons humanitaires, afin qu'il soit jugé dans son pays. M. Teneycke a affirmé que cela ne se fera pas. «Il s'agit d'un processus judiciaire, a-t-il dit, et non d'un processus politique.»

Le critique libéral en matière d'affaires étrangères, Bob Rae, a déclaré à La Presse qu'il n'était pas surpris de la réponse du premier ministre. «C'est un homme plutôt idéologique. Il a pris une décision idéologique», a-t-il dit.

M. Rae a souligné que les bandes vidéo démontraient fort bien «jusqu'à quel point M. Khadr était un adolescent traumatisé» qui avait été entraîné à 13 ans dans un camp militaire sans trop savoir ce qui lui arrivait. «Ce n'est plus seulement la question du sort de M. Khadr qui est en cause, estime M. Rae, c'est la réputation du Canada qui l'est. Nous avons la responsabilité d'offrir à nos citoyens une justice qui est impartiale et qui reflète non seulement les valeurs canadiennes mais les valeurs internationales.»

«Le Canada se rend coupable d'une violation aussi flagrante qu'aberrante des droits de la personne et de la Convention des Nations unies sur les droits des enfants, dont il a pourtant été l'un des architectes. C'est révoltant, rien de moins», a pour sa part déclaré la critique adjointe aux Affaires étrangères du Bloc, Johanne Deschamps. Enfin, le critique des droits de la personne du Nouveau Parti démocratique, Wayne Marston, s'est déclaré bouleversé par les images. «Les Canadiens s'attendent à ce que leur gouvernement fasse respecter leurs droits, non pas qu'il les leur enlève», a-t-il dit.